A LA LUMIERE FROIDE DE LA TERRE – Première Partie – Chapitre 1

La Migration

Chapitre 1

Année terrestre 2248

J’étais encore enfant quand il devint évident que la vie sur terre était compromise pour si longtemps qu’une alternative devait être trouvé au plus vite. En effet, le berceau de l’humanité rejetait ses enfants, menaçant même de les éradiquer.Pourtant, déjà à cette époque, je pensais que ce n’étais qu’un juste retour des choses. On ne pouvait pas se servir indéfiniment et ne jamais rien donner en échange. Nous avions pillé la planète, nous l’avions polluée à un point tel que rien ne pouvait plus être cultivé en plein air. Il n’existait plus aucune source d’eau potable et nous avions du apprendre à traiter les eaux sales des nappes phréatiques encore existantes. Il ne pleuvait que des pluies acides qui brulaient la peau et tuaient la végétation, rendant la terre stérile. Les mers et les océans se déchainaient en permanence dans des tempêtes si effroyables que plus aucun bateau ne pouvait naviguer. La plupart du temps, le ciel était déchiré d’éclairs, malmené par des tornades incessantes qui rendaient le transport aérien plus que périlleux, quand il ne faisait pas une chaleur si accablante qu’il était dangereux de rester dehors plus de quelques minutes.

Le message était clair : nous n’étions plus à notre place sur cette planète qui nous avait tant donné. Nous avions deux options : mourir ou partir.

Ce constat avait conduit les communautés scientifiques du monde entier à se mobiliser, unies pour la première fois dans une quête commune.

Des recherches de grandes envergures avaient été entamées dans tous l’univers. Des sondes avaient été envoyées dans l’espace pendant que des télescopes géants scrutaient le ciel inlassablement. Après quelques années infructueuses, une femme opiniâtre et déterminée nommée Sobia Zablonski, ingénieur astronome et scientifique mondialement reconnue pour ses travaux sur la « migration », découvrit la planète qui allait nous accueillir dès que nous serions prêts.

À partir de là, les grands travaux commencèrent. Chacun fut mobilisé en fonction de ses compétences et de ses capacités. Tous devaient œuvrer dans le même but : construire des vaisseaux spatiaux capables de transporter l’humanité sur cette nouvelle planète.

Tous furent appelés à se former à un métier utile permettant l’installation et la survie de l’humanité sur cette nouvelle planète appelée « Matria » par Sobia Zablonski.

Cette femme ambitieuse avait évolué rapidement au sein du gouvernement unique qui régnait sur la planète et elle portait maintenant le titre mérité de Présidente de l’Humanité pour son dévouement à la cause et son impressionnant travail sur la « grande migration ». C’est ainsi qu’avait été nommé l’immense mouvement qui devait en un seul temps, nous transporter tous sur notre nouveau lieu de vie.

Les premières sondes étaient partie en repérages des années auparavant, suivies par des navettes contenant les premiers humains chargés de viabiliser et d’aménager le territoire. Du matériel et des équipements avaient été exportés au fil des années afin d’assurer une installation rudimentaire mais fonctionnelle.

Sobia avait profité de sa grande notoriété pour faire adopter de nouvelles lois internationales que les habitants de la planète avaient votées en masse.

Une langue universelle avait été instaurée pour permettre que tous se comprennent. Le respect de l’environnement était devenu un dogme. Des lois veillant à supprimer le gaspillage, la surproduction et la pollution avaient été adoptées. L’égalité pour tous devait devenir le slogan de cette migration. L’abolition de l’argent comme mode de paiement, au profit de l’échange et de la mutualisation des moyens et de la production, avaient été entérinés.

Enfin, nous avions été préparé au départ, chacun participant à sa manière et avec ses capacités, à son bon déroulement.

Matria était une planète calme, comme l’avait qualifiée Sobia. Elle était constituée d’un seul et immense continent entouré d’un océan. Une chaine de montagnes perpétuellement enneigées le traversait dans toute sa longueur, séparant le nord et le sud d’une infranchissable barrière. Le climat était relativement égal sur tout le territoire et seule la proximité des montagnes ou de l’océan, le modifiait. Matria, à la différence de la terre, effectuait sa révolution en approximativement mille deux cent jours qui se décomposaient en quatre saison de trois cent cinquante jours chacune. Son activité sismique était quasi inexistante et ses ressources naturelles semblaient inépuisables, pour nous qui manquions de tout. Il avait cependant était décidé officiellement que nous n’exploiterions plus rien à des fins mercantiles ou personnelles, mais uniquement dans le but de servir l’humanité et son développement jusqu’à un seuil jugé raisonnable. La raison allait-elle réellement émerger de tout cela ? Nous l’espérions.

Durant les douze années qui suivirent la découverte de la planète salvatrice, nous fûmes tous triés dès notre plus jeune âge. C’est ainsi que je fus séparée de mes parents, comme beaucoup d’autres adolescents et que je « rencontrais » Joshua quand j’intégrais la très prestigieuse « Académie de Matria ». Notre école, constituée de petites unités de classes spécialisées, ne comportaient que des formations spécialisées de très haut niveau, dispensées dans le but de faire de nous les futurs gestionnaires de ce monde nouveau que nous aurions à bâtir. Ce n’était cependant pas la plus prestigieuse.

« L’École Politique » formait les plus brillants d’entre nous, les futurs dirigeants du monde nouveau. Mais nous ne nous plaignions pas de notre affectation. En effet, la plus grande majorité de la population avait été répartit dans des écoles de formation pratique où un métier leur était appris. Nous venions d’un monde robotisé et informatisé où la machine avait pris la place de l’homme, le rendant incompétent à toute tâche manuelle. Tout était à réapprendre. Les métiers s’étaient perdus et tous devaient se les réapproprier. Douze années plus tard, nous étions pratiquement prêts et nous attendions avec impatience le grand départ, la grande migration dont la date avait était fixée au printemps 2249.

Nous devions tous nous envoler dans d’immenses bâtiments dont la construction avait mobilisé des millions de personnes depuis la découverte de Matria. Ces bâtiments appelés vaisseaux, se construisaient lentement mais surement à l’abri des montagnes qui leur servaient de forteresses protectrices. Le monde entier se préparait à cette migration. La terre ne nous manquerait pas, elle n’était plus que ruines et désolation. Nous espérions qu’après notre départ, elle parviendrait à se régénérer et à faire renaitre la vie comme elle l’avait toujours fait. Mais pour nous, elle était perdue. Elle représentait le passé. Aucun de nous n’y reviendrait jamais. Seuls nos descendants en auraient peut-être la possibilité. Nous partions donc sans regret car nous vivions depuis des années dans la peur de la catastrophe finale, celle qui nous anéantirait tous, éradiquant toute vie humaine ici ou ailleurs. En effet, les premières colonisations avaient été effectuées par des hommes seuls, sélectionnés pour leur robustesse et leur capacité à se défendre dans un univers dont personne ne connaissait le degré d’hostilité. Aucune femme n’avait encore mis le pied sur Matria. Nous allions le faire toutes ensembles, du moins c’est ce que nous espérions.

 

Durant notre formation, nous avions tous étaient longuement rodé à « l’embarquement » et chacun de nous savait ce qu’il avait à faire et où il devait aller.

Tous les sites d’embarquement étaient implantés dans des grottes creusées à flanc de montagnes ou de falaises. Les vaisseaux-mères, qui avaient tous été construits sur place, étaient accrochés à l’extérieur, à même la roche, abrités par d’épais toits de béton armé.

L’astroport dans lequel nous nous trouvions Joshua et moi, était l’un des plus petits que comptaient les douze mille sites de lancement répartis sur tous les continents. Il abritait une centaine de vaisseau-mères et à peu près cinq cents mille personnes attendant le grand départ. Nos habitations provisoires étaient réparties sur une vingtaine de niveaux que desservaient des escaliers métalliques reliant entres elles les esplanades de chaque étage. Au plus bas niveau de la grotte, se trouvaient les quais d’embarquements reliés à la roche par de larges passerelles surplombant le vide.

Chacun d’entre nous devait embarquer dans un vaisseau précis, puis se diriger vers une des deux cent cinquante navettes situées à l’intérieur de la superstructure en suivant un chemin balisé par un marquage au sol coloré. Chaque étage portait une couleur spécifique à laquelle s’ajoutait ensuite une couleur correspondant à chaque bloc d’habitation. Nous étions tous équipés d’une combinaison et de brassards de couleurs comportant plusieurs bandes en fonction de notre niveau d’accréditation et de formation. Joshua et moi portions une combinaison noire sertie de cinq bandes violettes sur le haut du bras qui indiquaient tout autant notre grade que notre destination. Tout avait été prévu, tout avait été planifié, tout avait été pensé. Depuis des mois nous répétions les mêmes procédures d’embarquement inlassablement et en théorie, comme dans nos entrainements mensuels, cela se déroulait toujours parfaitement. Il ne pouvait y avoir d’erreur ni de problème. Notre place dans chaque vaisseau et dans chaque navette était attribuée depuis longtemps en fonction de notre niveau de formation et de notre destination. Cette navette devait nous emmener jusqu’à un lieu de vie prévu depuis tout aussi longtemps et pour lequel toute notre existence était prédéterminée. Joshua et moi allions nous installer dans les plaines intérieures de notre nouveau territoire.

Joshua avait été choisi pour ses connaissances particulières en botanique, rigoureusement développées de telle sorte qu’il fut à même de nous guider de façon intelligente et rationnelle dans nos cultures à venir. Pour ma part, mes compétences en mathématiques, en technique des matériaux et ma capacité à concevoir en trois dimensions avaient déterminé ma formation d’architecte, fonction pour laquelle j’étais maintenant prête malgré mon jeune âge. J’avais vingt ans et Joshua vingt-cinq et nous quittions pour toujours une terre ravagée et en pleine convulsion, pour une nouvelle planète sur laquelle nous espérions ne pas reproduire les mêmes erreurs.

Cependant, la terre nous avait peut-être un peu trop supportée et elle avait décidé, en un matin glacial et sombre, de se préparer à s’ébrouer si fort qu’elle réduirait en poussière toute vie encore existante à sa surface ou dans ses sous-sols. Malheureusement, les vaisseaux n’étaient pas prêts, pas totalement en tout cas. Les équipes scientifiques et techniques avaient espéré bénéficier de plus de temps, mais la terre ne nous l’accordait pas ! Il fallait embarquer et partir au plus vite. Sobia et son état-major avait déclenché les alarmes dans tous les pays du globe et chacun avait tenté, dans la confusion générale, de se conformer à ses instructions.

 

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