Ensembles

La nuit autour d’eux, le bruit des vagues sur la plage encore sages, les cris des hommes, les coups qui broient les membres et explosent les têtes. Devant, un canot.

Pauvre rafiot rafistolé à la colle et aux emballages plastiques ficelés. Corps contre corps, ils se sont tassés ensembles. Amas de jambes, de bras, de chair terrifiée d’où dépassent des têtes d’enfants, des nourrissons étrangement silencieux. L’embarcation a été poussée, une voile rudimentaire s’est gonflée, un petit moteur a toussoté, peinant à propulser cette masse humaine flottante, emportant la baque loin du rivage. Le temps est passé lentement, succession sans rythme, nuits jours, silence pesant quand le moteur a rendu l’âme. A court d’essence, à court d’eau. Parfois un cri d’oiseau les a raccrochés à la vie. Promesse d’une terre. Soudain un cri a retenti, le premier depuis une éternité. Les pieds dans l’eau, les jambes mouillés, les corps qui s’agitent. La mer monte dans la barque qui n’est plus qu’un radeau éparpillé. Des bois arrachés en soutiennent certains. D’autres nagent. Des cris, des hurlements dans l’infini bleu.

Ensembles ils se sont noyés dans le soleil couchant.

Au matin, leurs corps sans vie jonchaient la plage tranquille à cette heure matinale.

Enfin la terre promise !

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