A LA LUMIERE FROIDE DE LA TERRE – Troisième Partie – Chapitre 4

Chapitre 4

49° jour de la saison de printemps de l’an 1

Les journées suivantes furent consacrées à l’atterrissage des navettes qui repartaient immédiatement après avoir été vidées. Le village s’organisa pour participer au déchargement et au stockage de trésors que nous ramenions avec nous.

L’armement fut réparti : les armes lourdes hissées sur les tourelles de surveillance et le canon, que nous n’avions décidé de n’utiliser que dans les situations extrêmes, fut arrimé sur un tertre et caché par des filets de camouflages. La palissade était terminée et les hommes collectaient des pierres dans la rivière et sur les berges du fleuve pour renforcer sa base. Je conçus rapidement une maison pour Sobia qu’elle souhaitait proche de son amie Orep. Avec l’assentiment du couple, je la situais donc légèrement au-dessus de la leur. Sobia semblait transfigurée. Elle n’avait jamais vu Matria et semblait découvrir la planète avec une joie qui nous fit plaisir à tous et calma les plus acharnés.

Sa longue captivité l’avait terriblement affaiblie physiquement et fragilisée psychologiquement. Elle n’affichait plus la superbe que je lui avais connue sur le vaisseau, même si elle reprenait des forces grâces aux attentions incessantes d’Orep qui la couvait littéralement. Sorel s’accommodait comme il pouvait de cette nouvelle présence, mais il fut soulagé quand la maison de Sobia fut terminée. Elle avait demandé trois pièces simples et de plain pied. Une première pièce faisait office de cuisine et de salon. Elle desservait un bureau de petite taille et une chambre encore plus petite. Les immenses meubles de sa suite présidentielle n’avaient pu y rentrer et la plupart étaient stockés dans une réserve parfaitement étanche que nous avions creusée sous le village. Les œuvres d’arts y étaient aussi entreposées. Il était inconcevable de les exposer à l’air marin qui entrait sans cesse dans la demeure perpétuellement ouverte à l’air et au soleil. Quelques bibelots ornaient l’habitat mais Sobia avait fait le choix d’une sobriété qui nous surpris tous. Les premiers temps, elle arpentait la plage accompagnée d’Orep qui lui faisait visiter le site et lui faisait découvrir les fruits locaux, les animaux et les coquillages. Sobia se découvrit une passion pour ceux-ci qui dépassa de loin celle d’Orep. Je voyais souvent les deux femmes sur la plage au petit matin quand j’ouvrais mes volets, marchant et parlant avec animation. Elles semblaient heureuses.

Sobia m’observait souvent longuement et j’étais intriguée par cette attention mais je n’avais pas le temps de m’interroger. J’avais une multitude de questions à lui poser mais j’avais trop à faire. Je savais que nous devrions parler à un moment ou à un autre et que nous mettrions à plat ce que chacune de nous avait à dire. Pour le moment, j’avais un objectif que je n’arrivais pas réaliser, tant j’étais prise par les diverses tâches liées à notre voyage sur le vaisseau. Quinze jours s’étaient écoulés depuis le départ quand je pus enfin sceller gazelle et partir pour la grotte de la falaise, porteuse d’un sac rempli de nourriture. Martial, qui savait que je ne pouvais m’équiper d’une balise, me regarda m’éloigner avec crainte. Mais j’avais été intraitable, je devais me rendre à ce rendez-vous. J’aurai du m’y trouver depuis déjà longtemps. Je craignais que mon ami, effrayé ou désespéré de mon absence, ne vint plus. Quand j’arrivais sur la plage, je mis gazelle à l’abri dans l’anse protectrice où se trouvait la cabane et revint prudemment jusqu’à la grotte. Elle était vide. Je ne m’attardais pas, craignant d’y faire de mauvaises rencontres. Dans la cabane, rien ne laissait supposer qu’il était revenu. Je m’installais confortablement pour l’attendre.Je n’étais pas pressée, anxieuse et excitée certes, mais j’avais tout mon temps. Mon travail était momentanément fini et je rêvais de revoir Alex. J’avais l’impression d’avoir été si occupée que je l’avais oublié, mais en me trouvant là, allongée sur ce matelas, parmi les maigres affaires qu’il avait rassemblé au fil du temps, je m’aperçu qu’il m’avait énormément manqué et qu’il n’avait pas quitté mon esprit. Je mangeais un peu en espérant que le temps allait s’accélérer. Dans l’après-midi, j’apportais de l’eau fraiche à gazelle qui avait de l’herbe à profusion. J’avais découvert une source qui dégringolait de la falaise en une cascade fine mais bruyante et qui se perdait dans les roches. Malgré mes recherches, je ne parvins pas à la retrouver sur la plage. Elle disparaissait entre deux grosses pierres, comme absorbée et ne semblait pas ressortir dans l’océan. En fin d’après-midi, ayant épuisé ma patience, j’arpentais la plage jusqu’à son extrémité ouest. Des gros rochers la fermaient. De loin ils m’avaient semblé infranchissables mais en m’approchant, je m’aperçu que l’on pouvait aisément se glisser dans un passage à travers un petit labyrinthe de pierres qui débouchait sur une crique où je découvris une seconde cascade. J’avais retrouvé la trace de l’eau. Elle s’écoulait le long de la paroi dans un bruit sourd et tombait dans un bassin naturel qui s’était creusait au fil du temps. Je m’y baignais, heureuse de me rafraichir. Gazelle ne pouvait m’y rejoindre car le passage était trop étroit pour elle. Je lui remplis donc plusieurs seau que je lui apportais afin qu’elle se désaltère durant la nuit, puis je la bouchonnais et la laissais à sa mastication précise et méthodique. Je retournais à la cabane où j’allumais une lampe sourde. Elle éclairait faiblement, me permettant de me repérer ou de lire, mais ne brillait pas dans la nuit. J’avais emporté un duvet et je m’en félicitais car la nuit était fraiche. Je m’allongeais sur le matelas, au chaud et j’écoutais le chant des animaux marins. La première lune se leva. Elle n’était pas pleine mais elle éclairait suffisamment la côte pour que je distingue, à travers les bois disjoints de la cabane rudimentaire, la masse imposante des grands poissons. Les geysers qu’éjectaient leurs évents montaient haut dans la nuit sombre et brillaient à la lumière des milliers d’étoiles. Un soir de veillée, Martial m’avait montré l’une d’entre elles. Elle formait la pointe la plus éloignée d’un triangle à peine perceptible dans le ciel. C’était la terre…Elle brillait faiblement et cette lumière froide me semblait hostile. Jamais nous n’aurions eu tant de liberté si nous étions restés sur terre. Jamais nos vies n’auraient pu prendre ce cours si nous n’étions pas partis.

Nous aurions du continuer à nous battre pour notre survie. Nous aurions trimé inutilement durant toutes nos misérables existences, vivant et travaillant sous terre, ne sortant que de rares instants, emballés dans des protections, pour contempler un paysage funèbre. Même si nous étions parvenus à nettoyer la planète et à survivre à sa furie, seuls nos descendants lointains auraient pu en bénéficier, à condition qu’ils n’aient pas eux non plus détruits le fruit du travail acharné de plusieurs générations.

Sur Matria, nous nous levions le matin à la lumière du soleil. Nous respirions un air frais et pur, nous buvions de l’eau propre et limpide que nous prenions directement dans la rivière. Nous mangions nos fruits et nos légumes, notre viande. Nous fabriquions tout ce dont nous avions besoin et rien de plus. Le futile et l’inutile avaient été bannis de nos vies.

Le soir, quand nous nous réunissions, nous tenions assemblée, nous nous parlions, nous partagions nos expériences, nos envies et nos espoirs. Tout ce que ce monde meilleur nous permettait de souhaiter pour nous et les enfants qui naissaient régulièrement.

Incapable de dormir, je me levais et me rendis au bord de l’eau. Assise dans le sable, j’écoutais les vagues refluer doucement, quand soudain une masse sombre arriva, nageant à une vitesse impressionnante. Elle semblait foncer droit sur moi et je n’eus pas le temps de bouger qu’elle émergeait déjà de l’eau, courant ou rampant sur de courtes pattes. Elle était impressionnante. Relativement informe, comme une baleine molle. Quatre pattes par côtés ornaient ses flancs aux reflets irisés. Des pattes palmées longues et larges, crénelées comme du varech, d’un bleu plus soutenu. Elle m’évita au dernier moment et vint frotter son ventre sur le sable. Je me levais précipitamment et pris quelques distances. L’animal n’avait pas l’air agressif mais je demeurais sur mes gardes. Elle semblait prendre plaisir à s’enduire de sable, roulant sur elle même, projetant dans les airs des gerbes qui retombaient dans toutes les directions. Soudain elle me vit, comme si ma présence lui apparaissait tout à coup. Elle s’immobilisa, tourna la tête vers moi et j’aperçu sa grande gueule sans dent, ses yeux bleus immenses et un peu laiteux. Elle poussa un barrissement retentissant puis se dandina en marche arrière et disparue dans l’eau aussi vite qu’elle était apparue. Je la vis rejoindre ses congénères qui s’étaient rassemblés à quelque distance. Je décidais de me replier dans la cabane, à l’abri des rochers. Bien m’en prit car la nuit durant, les unes après les autres, les grandes bêtes, dont les bourrelets se contractaient quand elles sortaient de l’eau, virent se rouler dans le sable jusqu’au petit matin. A l’aube, elles reprirent la mer et disparurent. Le silence revint et je m’endormis enfin. J’en étais à me demander pourquoi elles ne s’approchaient pas de notre village quand le sommeil me gagna. Une autre journée s’écoula durant laquelle je me baignais, patientait longuement aux heures les plus chaudes, dans l’attente de l’arrivée espérée d’Alex. Quand le soleil commença à décliner, je fis une ballade sur le dos de gazelle, lut longuement et somnolais. Le soir tombait et je me préparais à passer une nouvelle soirée en solitaire. Je m’approchais de gazelle qui avait tondus tout un carré d’herbe et s’attaquait maintenant à un buisson qui l’obligeait à tendre le cou au dessus des rochers. Elle allait l’engloutir quand je repérais dans sa bouche, une feuille de papier. Je la retirais prestement malgré ses protestations bruyantes. Il s’agissait d’une page de livre arrachée. A travers les marques déjà visibles de la mastication, on pouvait y lire, tracé d’une main tremblante : « attendez-moi, je reviendrai dès que je pourrais ». La fin de la phrase était presque illisible et je m’aperçu avec horreur que des taches noires en maculaient les coins. Une empreinte partielle de doigt apparaissait en filigrane. Alex avait du sang sur les mains quand il avait écrit ce mot qu’il avait dû poser dans la cabane et que le vent avait probablement emmené. Je flattais gazelle qui hennit doucement. Sans elle, je n’aurais jamais trouvé ce mot. Je m’accrochais à son cou, saisit d’une immense peur. S’il ne revenait jamais ? Je ne connaissais pas les passages qui permettaient de circuler dans les grottes. Je ne savais où le chercher. Que s’était-il passé la dernière fois que je l’avais vu, quand je partais et que les cris retentissaient sur la plage ? J’aurai du redescendre, j’aurai du l’aider. Je m’en voulais de l’avoir abandonné. Je n’avais pas mesuré le danger qu’il courait.

Incapable de tenir en place, je retournais à la grotte que j’explorais consciencieusement. Je n’y trouvais aucune trace de mains, à la différence de la grande grotte de la plaine. J’arpentais le sol, éclairant les pierres de ma lampe torche. La vieille lampe était toujours là. Les reflets irisés, bien que captivants, ne parvinrent pas à retenir mon attention cette fois-là. J’étais déterminée à comprendre le mystère de ces grottes. J’éclairais successivement le dessus de chaque tunnel, espérant y retrouver des traces, des inscriptions, mais il n’y avait rien.

Je décidais de les explorer les uns après les autres, minutieusement. Mon examen approfondis du premier ne donna rien. Il était court, droit et sans aspérité. Le deuxième tournait vers le milieu et la lumière de la lune n’y pénétrait plus. J’examinais les flancs avec attention quand un bruit retenti un peu plus loin. Dans les boyaux, le son résonnait et il me fut difficile de le localiser. Par précaution, j’éteignis ma lampe et je m’avançais vers l’extrémité du tunnel. Des lumières balayaient la grotte. De gros faisceaux lumineux qui me mirent en alerte. Je distinguais la lumière de plusieurs lampes torches très puissantes. En essayant de ne faire aucun bruit, je me renfonçais dans le tunnel. Des hommes, quatre estimais-je, parlaient entre eux :

– je ne pense pas qu’il soit revenu par ici, y-a rien !

– justement ! Si tu voulais te planquer, t’irais dans un endroit où y-a du monde toi ?

– non, mais je crois pas qu’il soit revenu, je te dis.

– de toute façon, il était dans un sale état. Il a pas du aller loin quand il s’est tiré.

– je regrette qu’on l’ait pas achevé ! Depuis le temps qu’il nous fait courir !

– bon, on regarde quand même dans les couloirs ?

– si tu veux mais je vais pas dehors. J’ai failli me faire choper par un « baveau » l’autre fois !

– mais ça c’est parce que tu leur tires dessus ! On t’a dit cent fois de pas le faire ! Ils sont inoffensifs si tu leur fous la paix !

– je les aime pas. Ils sont gros et mou, et puis leurs pattes, elles me foutent les jetons, c’est pas normal un poiscaille avec des pattes.

– c’est pas des poissons. On te l’a déjà dit, c’est des mammifères. Ils peuvent vivre hors de l’eau si ils veulent, mais ils veulent pas…

– raison de plus pour pas aller sur la plage…

– bon, ces couloirs…

J’avais profité de ce dialogue décousu et bruyant pour reculer au fond du tunnel et je me retrouvais sur la plage. Je m’allongeais sur le sable, collée contre la paroi, espérant ainsi passer inaperçue. Je n’avais aucune autre possibilité. Je n’avais pas le temps de courir me mettre à l’abri derrière les rochers. Il me restait à espérer que leur peur des « baveaux » les empêcherait de franchir le seuil des tunnels. J’entendis leurs voix se rapprocher. Les lampes envoyaient leurs puissants faisceaux lumineux dans toutes les directions, comme des phares devenus fous. Quand je vis la lumière franchir le coude du tunnel le plus proche, je me m’écrasais contre la paroi. J’avais peu d’espoir. La lune était haute et j’étais vêtue de sombre. Le sable clair et la roche bleutée ne me masqueraient pas longtemps. Je vis leurs chaussures avant d’entendre leur voix. Les lampes fouillaient la plage et s’approchaient dangereusement de moi quand un animal monstrueux surgit de l’eau et fonça sur eux de toute la vitesse de ses courtes pattes palmées. Sa gueule béante s’arrêta à l’entrée de la grotte pendant que les hommes détalaient en hurlant. L’animal barrit longuement puis resta un moment immobile. Sa tête était à quelques dizaines de centimètres de la mienne. J’aurai pu le toucher en tendant la main, il aurait pu m’engloutir dans sa gueule ouverte. Nous n’en fîmes rien…je le regardais, fascinée par cette masse phénoménale et il tourna son œil bleu pale vers moi. J’aurais juré qu’il me regardait lui aussi. Puis le silence étant revenu dans les grottes, il se tortilla sur son gros ventre, fit demi tour en jetant du sable partout autour et je le vis rentrer lentement dans l’eau. J’entendis longtemps pour me relever. J’aurai du explorer les tunnels mais j’avais trop peur, je retournais à la cabane et me couchais, épuisée.

Je passais les deux jours suivants à attendre, angoissée par le moindre bruit, sursautant quand des cailloux s’éboulaient de la falaise. Je n’osais passer trop de temps dans l’eau, craignant d’y être surprise sans défense. Je gardais mon arme à la ceinture. Mes vivres diminuaient dangereusement et je commençais à désespérer. j’envisageais de rentrer au village. Je décidais cependant de passer encore une nuit dans la cabane et de rentrer dès le lever du jour. Pour une raison que je n’arrivais pas à comprendre, les hommes, qu’ils fussent gardes ou mercenaires, semblaient préférer se déplacer la nuit. Je me gardais bien de m’approcher de la grotte dès que le jour déclina et me tint loin du bord de l’eau, même si je craignais moins les animaux marins que les humains et leurs armes. Le début de la nuit fut calme. Les vagues amenaient leur lot d’animaux avides de se rouler dans le sable et je dormis peu. Soudain, je fus tirée de ma torpeur par un cri venant des grottes. Je sortis de la cabane et me glissais le long des rochers, contournant prudemment quelques baveaux qui paressaient. Ils me regardèrent passer devant eux sans bouger. Leurs yeux me suivaient pourtant avec attention. Je m’approchais des tunnels, le bruit de mes pas couverts par leurs mouvements de reptation, quand Alex surgit dans la lumière de la lune. Il semblait peiner à marcher et je vis ses mains enserrer son ventre sanglant. Derrière lui, des clameurs retentirent. Je me jetais sur lui et tentais de le tirer à l’abri derrière les animaux. Il titubait, visiblement affaiblit. Il s’accrocha à mes bras comme à une bouée. Je tenais mon arme à la main, prête à défendre chèrement nos vies mais un des baveaux proche de moi, me jeta une pelletée de sable, la faisant tomber de ma main. Les hommes surgirent à leur tour et leurs lampes me prirent en étaux dans leurs faisceaux puissants. J’étais éblouis et j’attendais de recevoir leurs balles quand deux évènements simultanés se produisirent : tout d’abord, un des baveaux s’avança en rampant et s’interposa entre les hommes armés et nous, ensuite, des coups de feu retentirent du haut de la falaise, suivi de cris indistincts. Puis le silence revint. Les baveaux disparurent immédiatement et j’entendis des voix d’homme se rapprocher. Je tenais Alex dans mes bras, dont les forces avaient lâché. Il était tombé dans le sable, inconscient. Je me sentis attraper par les épaules et j’allais ruer quand la voix de Martial se fit entendre :

– tu vas bien, petite ?

– Martial ? Mais qu’est-ce que tu fais là ? m’écriais, surprise autant que soulagée.

– je te surveille petite écervelée. Ça fait deux jours qu’on guette là haut !

– mais pourquoi ?

– parce que je me faisais du souci pour toi ! Tu ne rentrais pas, et après ce que tu m’avais raconté, j’ai préféré venir te chercher…J’ai eu raison on dirait.

Pendant qu’il parlait, des ombres m’arrachèrent Alex et je le regardais partir sur une civière. Je reconnus Joshua et Solion ainsi que quelques autres qui s’activaient autour de lui. D’autres tiraient les corps des gardes sur le sable où ils furent dépouillés de leurs armes et emballés dans des linceuls, puis leurs corps furent chargés sur des chevaux et ils disparurent le long du sentier.

– que vont-ils en faire ? demandais-je hagarde.

– les examiner puis les enterrer. Mais nous ferons tout cela un peu plus loin parce que nous ne savons pas combien de gardes circulent dans le coin. Nous en avons eu quatre.

– j’en ai compté quatre l’autre soir moi aussi.

– dis-moi, tu es folle de te jeter au milieu de ses énormes bestioles !

– écoute Martial, je crois qu’elles m’ont protégée. L’autre soir, j’ai faillit être repéré par les gardes quand l’une d’entre elles leur a presque sauté dessus. Ils en ont terriblement peur. Ils se sont enfuis et le baveau m’a regardé distinctement avant de s’en aller…

– le baveau ? s’exclama Martial surpris.

– c’est comme ça que les gardes les appellent.

– Bon on éclaircira ça plus tard…Allez vient, il faut partir. Nous avons une charrette là-haut et nous devons rapidement ramener ton ami au village pour le soigner, il semble mal en point.

– je n’ai même pas pu lui parler…Il s’est évanoui juste après être sorti de la grotte. J’espère qu’ils ne lui ont pas tiré dessus me lamentais-je, désespérée à l’idée qu’il ne survive pas à ses blessures.

– pas ce soir, non ! Nous ne leur en avons pas laissé le temps.

– merci Martial, merci de t’être soucié de moi. Sans toi, je serai probablement morte.

– ne t’inquiète pas, C’est normal que je veille sur toi, tu es notre chef ! me dit-il affectueusement en me serrant dans ses bras.

– j’ai vu que Joshua était là, lui aussi…

– oui, il a insisté pour venir. Il a dit qu’il ne pouvait pas te laisser seule sans défense ou je ne sais quoi du même style. Daïa était très en colère. Elle va bientôt accoucher et elle ne peut presque plus bouger.

– bon, rentrons ! dis-je impatiemment, Je vais chercher Gazelle, elle m’attend à coté.

Je revins avec le cheval et je cheminais à coté de la charrette sur laquelle Solion, après avoir sommairement bandé Alex, tentait d’endiguer le sang qui coulait de sa blessure. La route fut longue et je voyais mon ami décliner au fil des heures. La charrette allait lentement, au rythme régulier mais solennel des bœufs. Quand nous franchîmes enfin la porte du village, le soleil se levait. Alex fut immédiatement transféré au dispensaire où il fut confié à Mafalda. Solion, bien que fatigué, tint à l’assister, de même que Flavy, dont la formation de sage-femme lui permettait d’effectuer les accouchements en l’absence du médecin. Cette dernière, enceinte de presque sept mois, travailla toute la journée à réparer les chairs déchirées. Le village était en effervescence. Un deuxième étranger venait de faire son entrée parmi nous et même s’il n’était pas en état d’être vu, sa présence mit tout le monde en ébullition.

Grace à Martial qui m’escorta jusque devant ma porte, je réussi à échapper aux questions qui fusaient de toutes part et je trouvais même le temps de me reposer un moment mais le soir, un repas commun fut organisé dont je me serais bien passé, ayant accumulé beaucoup de fatigue au cours des derniers jours. Pourtant, je fus pratiquement sommée de prendre la parole et d’expliquer dans quelles circonstances j’avais rencontré cet homme. J’éludais certains passages, particulièrement mes questionnements quant à la circulation dans les grottes et je privilégiais une rencontre fortuite, ce qui était le cas, durant laquelle nous avions échangé de précieux renseignements sur la planète.

Je les rassurais en leur indiquant que j’en avais plus appris que je n’en avais révélé.

Sobia sembla très intéressée par mon récit sur les gardes et je lui proposais de passer me voir le lendemain afin que je lui explique ce que j’avais découvert. Je pu enfin aller me recoucher sous le regard bienveillant de Martial, non sans être  passé au dispensaire où reposait Alex, pâle et toujours inconscient. Je fis promettre à Solion, qui allait le veiller toute la nuit, relayé par Flavy, de me prévenir en cas de changement, et je tombais dans mon lit comme une masse.

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