SUR LE FOND – Chapitre 8 – Sexe, mensonges et vidéo

Chapitre 8

Sexe mensonges et vidéo

J’aimerai dire à madame Fauré que je sais de quoi elle parle. Je les ai visionné ces foutus films et ça n’a pas été agréable de regarder cet étalon du dimanche prendre la pose devant la caméra

tout en ramonant son épouse ou des dizaines d’autres conquêtes. Vanessa Rabatto, fait l’objet d’un traitement spécial. Comme me l’a dit son épouse, elle avait droit au grand lit, ce qu’il ne réservait jusque-là qu’à sa femme. La voiture vient après. Presque dans les derniers jours. C’est là qu’il a du se passer quelques choses, j’en suis persuadé. Peut-être l’arrivé intempestive de robert Rabatto. Mais ce dernier nous a dit les avoir découverts dans le garage. En tout cas, Je reste encore épaté par la quantité de films que nous avons trouvé. Impossible d’interroger toutes les femmes présentes sur les vidéos, elles sont trop nombreuses et les films s’étalent sur presque quinze ans. Du VHS, on passe progressivement au numérique. Au demeurant, il était conservateur. Il avait tout archivé sur des DVD soigneusement cachés dans son garage. Il a fallu fouiller et ce n’est que par hasard que nous avons découvert la dalle de béton dans le sol, à peine visible tant la jointure était bien faite. Une petite cache pas plus grande qu’un petit coffre-fort, remplie de DVD.

Je repense à ce que Virginie Fauré vient de me raconter sur son amour naissant avec le dénommé thomas Ferrand- qu’il faudra que je convoque, même s’il est bien loin de ma juridiction – et je le compare à ces images d’elle, plus ou moins jeune, hurlant de plaisir sous les coups de boutoirs de son mari. Une femme à deux visages. J’aimerai en parler à Jenny, mais je ne peux toujours pas. Malgré le temps qui a passé et la confiance que je lui porte, je dois garder pour moi certaines parties de mes enquêtes. J’ai visionné sans le savoir les premières photos que Paul Fauré à fait de sa future épouse, sur le tabouret de bar. Elle ne savait pas ce qui l’attendait et elle semblait gêné mais si heureuse. Elle irradiait de bonheur. On voit bien qu’elle était amoureuse. Elle était si jeune. Seize ans à peine et déjà soumise aux caprices tordus de ce type.

Quand j’ai rencontré Jenny, malgré sa grande liberté, je n’aurai jamais osé la prendre en photo toute nue. Et pourtant, je repense souvent à la douceur de son corps. C’est ça qui m’a conquis dès le départ. Elle avait quelque chose de si tendre et de si attirant à la fois. Quelque chose qui me donnait le sentiment qu’en elle, j’étais en sécurité. Dès que j’ai arrêté de faire le con et de la traiter comme une poule que l’on plume, j’ai vu sa douceur, cette incommensurable gentillesse. Je la revois particulièrement un matin, le jour se levait avec peine et nous aussi, qui n’avions que peu dormi. Elle était alanguie dans mon lit un peu étroit pour nous deux. Elle avait relevé un bras au-dessus de sa tête et je contemplais la bancheur nacrée de son aisselle qui ressortais dans la pénombre de la chambre, dévoilant un sein échappé du drap. Il m’est venu un mot que j’ai gardé pour moi de peur qu’il soit mal interprété : moelleuse. À partir de ce jour-là, je ne l’ai plus regardée de la même manière. J’ai commencé à l’apprécier, au sens littéral du terme. Je l’ai passée en revue, morceau après morceau. C’est maladroit de le dire ainsi, j’en ai bien conscience, mais je l’ai détaillée. Je voulais vérifier si tout était aussi tendre et moelleux. Et c’était le cas. Jusqu’à ses fesses, qui, quand elle s’allongeait sur le ventre, faisait ressortir deux petites fossettes au bas des reins. J’ai commencé à tomber amoureux.Ça n’est pas venu d’un coup.Ça s’est installé doucement. Un jour je la baisais, puis quelques jours plus tard je me languissais de ne pas la voir arriver. Petit à petit, jour après jour, elle a posé sa marque indélébile sur moi et je n’ai pas réussi à l’enlever, comme un tatouage. Jenny. Je pourrais faire tatouer son nom sur mon biceps mais je ne sais pas si elle aimerait ça.

Virginie Fauré, à en croire les vidéos, aurait pu se faire tatouer le nom de son mari partout sur le corps, mais je ne crois pas qu’elle aurait aimé ça, à postériori ! Certains films sont très courts, pris à la sauvette. Ils bougent au rythme de la main qui tien l’appareil. Ils filment principalement cet énorme sexe – que je reconnaitrais parmi des centaines, s’il était toujours en circulation – qui entre et sort de trous divers. Mais pas toujours. Parfois la mise en scène est soignée et les deux amants sont visibles. C’est comme ça que je sais que Madame Fauré avait des concurrentes. Vers la fin, Vanessa Rabatto est partout. En gros plan, particulièrement ses seins qu’elle écrase pour en faire un fourreau dans lequel s’agite la queue de Paul, jusqu’à ce qu’il éjacule en lui maculant le menton et le visage. Ses gros doigts recueillent la semence et en barbouillent la bouche arrondie, la langue qui sort entre les lèvres pulpeuses lèchelonguement le jus épais sur les doigts tendus. Ils sont souvent accompagnés de commentaires d’une vulgarité époustouflante mais qui semblent la mettre en appétit. Son sexe aussi fait l’objet de beaucoup d’attention. Des gros plans fixes où l’on peut voir des doigts rudoyer son clitoris dans des cris de plaisir déchirants. Parfois j’avais l’impression qu’elle simulait tant ses cris ressemblaient à ceux d’une actrice de film porno. Jusqu’à ce que je la vois se faire sodomiser, cramponnée au tabouret de la cuisine, hurlant de plaisir au rythme du monstre qui la pilonne. Ils sont filmés de profil, face caméra. On voit leurs visages, les seins tressautant de Vanessa, mais aussi son  anus élargi et la verge monstrueuse qui l’empale. Personne ne peut simuler un orgasme dans de telles conditions, à moins d’être totalement insensible. Cette femme devait vraiment aimer ça.Un détail me frappe auquel je n’accorde pas assez d’importance sur le moment. La caméra zoom longuement sur le sexe de Paul qui s’agite, sur l’anus de Vanessa qui ressemble à un rond de serviette tant il est épaté.

Madame Fauré n’est pas en reste, mais je ne peux m’empêcher d’avoir de la peine pour elle. Quand j’ai vu les film, dans les premiers mois après sa disparition, je me suis dit qu’elle ne valait pas mieux que sa voisine ou que toutes les filles qui avait laissé ce type leur mettre ce sexe épouvantable dans n’importe lequel de leurs orifices. Maintenant qu’elle m’a raconté sa vie, je comprends qu’au-delà de la dépendance et du plaisir qu’elle pouvait y trouver, elle a beaucoup plus souffert que je ne l’avais imaginé. Je la plains. Elle n’est qu’une victime de ce type maléfique qui transformait toutes les femmes en chiennes. Je me demande ce que Jenny aurait fait avec un type pareil. Quand je lui ai posé la question elle a baissé la tête et elle a dit :

– oh, moi, je ne lui aurais pas accordé un regard. Mais elle avait l’air gênée. Au demeurant je venais de lui raconter que j’avais passé l’après-midi à visionner des cassettes pornos réalisées par le mort et elle avait eu une grimace de dégout.

Cependant, les vidéos, nous ne les avons trouvés qu’après. Elles sont venues confirmer ce que nous supposions, puis la certitude que nous avions à l’époque.

J’ai donc interrogé Vanessa Rabatto sans avoir vu les cassettes même si je connaissais leur existence.

 

Petit matin gris, la pluie tombait derrière la vitre déjà sale. Vanessa Rabatto avait été amenée par un planton. Elle était toujours en chemise de nuit. Elle avait dû s’endormir sur un des bancs de la salle de garde car ses cheveux étaient emmêlés.

Elle s’était assise, resserrant son manteau autour de ses jambes sur lesquelles pendait la chemise de nuits de fin coton. Elle semblait à la fois vidée et prête au combat. Paradoxal !

On a commencé en douceur, quelques questions pour se mettre en bouche :

– que faisiez-vous le jour du meurtre, madame Rabatto ?

– rien, comme d’habitude…J’ai fait mon ménage après le départ de Robert, puis ma lessive, après j’ai je suis allé à la salle de sport. L’été je cours, mais quand il fait ce temps, je préfère le tapis. Il fait chaud et puis je vois du monde.

– justement, vous avez rencontré quelqu’un que vous connaissiez ?

– oui, le prof de step. Il est là tous les jours.

– vous êtes resté combien de temps à la salle de sport ?

– je ne sais pas, une heure et demie, peut-être deux. Je ne me souviens pas très bien, comme je mange toute seule le midi, je n’ai pas vraiment d’horaire.

– Et après ?

– après, je suis rentrée. J’ai mangé, j’ai étendu mon linge dans la buanderie à l’arrière du garage puis j’ai fait du repassage toute l’après-midi. Ensuite Robert est rentré et nous avons diné, puis la télé et au lit. Comme tous les soirs.

– À quelle heure Monsieur Fauré est-il arrivé ?

– je sais pas, vers cinq heure je vous ai dit. Il s’est garé vers cinq heures, je regardais mon feuilleton à la télé.

– vous êtes sûre ?

Son regard devient suspicieux. Elle sent que quelque chose ne va pas mais elle ne sait pas ce que c’est, alors elle se redresse, resserre encore un peu son manteau autour de son corps maigre et dit :

Non, je peux me tromper. Je regarde la télé toute l’après-midi en repassant et en préparant le repas. Je peux m’être mélangée avec un autre feuilleton.

– votre mari dit qu’à quatre heures, Monsieur Fauré était chez lui.

Elle accuse le coup puis elle réagit comme un serpent pris au piège :

– comment il pourrait le savoir d’abord ? Il travaille toute la journée.

– parce qu’il l’a vu, rappelez-vous, il en a parlé hier soir devant vous.

Là, elle semble sciée. Comme si elle était devenue amnésique. Elle devient soudain très pâle et j’ai peur qu’elle ne s’évanouisse. Mais elle se ressaisit :

– vous dites n’importe quoi. Il ne peut pas l’avoir vu ! Il était à son travail !

– Qui ça ?

– mais Robert, bien sûr !

– et pourtant…

– vous essayer de me piéger…je veux un avocat !

Alors je change de stratégie. Je ne sais pas à quoi elle joue mais elle ne peut pas faire comme si elle n’avait rien entendu. Elle était là et elle a réagi.

– pourquoi avez-vous tué Monsieur Fauré ?

Elle éclate en sanglot et chevrote finalement :

– je l’aimais. Je ne lui aurais jamais fait de mal. Il disait qu’il allait quitter sa femme pour moi,qu’il ne l’aimait plus ! Il disait que j’étais bien plus attirante qu’elle. Et puis Robert, il ne m’aime plus depuis longtemps.

– pourtant quand on voit la manière dont il vous regarde, ce n’est pas l’impression que l’on a.

– ça c’est parce qu’il est fasciné par ma poitrine. C’est pas moi qu’il aime c’est cette poitrine, et elle l’a presse encore une fois entre ses mains. Décidément, ça doit être une habitude chez elle.

Votre mari ditavoir trouvé Paul Fauré mort dans sa cuisine vers quatre heures, le 22 avril. Je ne vois vraiment pas, si on part du principe qu’il dit la vérité, comment vous auriez pu le voir arriver vers cinq heures ! Et, étant donné que ce témoignage l’accable, pourquoi inventerait-il ? Essai-il de vous protéger ? C’est ça Madame Rabatto ?

Voyant qu’elle ne réagit pas, je lâche mon morceau de choix, celui que je gardais pour un moment crucial comme celui-là, celui qui peut tout faire basculer :

– D’autre part, nous avons parlé avec Monsieur Teulé…Un monsieur charmant qui parle comme une vraie pipelette. Il nous en a raconté beaucoup sur votre pratique du tapis, comme vous dites…

Et sur ce je la laisse, blanche comme de la craie. Je veux qu’elle mijote un peu. Tout cette histoireRabatto commence à me courir. Ils mentent, ils se trompent, au propre comme au figuré. Ils n’ont rien du gentil petit couple de voisin que j’imaginais. Je les déteste. Ils font renaitre en moi des sentiments que j’avais tusdepuis longtemps. La haine, la jalousie, l’envie de vengeance. J’ai laissé tout cela derrière moi en partant pour le nord mais ils le ravivent avec leurs vies faites de mensonges et de sexe sale. Je sais que je suis partial mais les histoires de tromperie, ça me donne envie de gerber. Surtout depuis que je connais Jenny. C’est la dernière personne dont je voudrais douter. Elle semble si franche, si honnête, si carrée. Mais eux aussi me semblait parfaitement corrects quand je les ai rencontré. Certes, Madame Rabatto en faisait beaucoup avec la disparition de son voisin  mais c’est bien de veiller les uns sur les autres. Quel naïf j’étais. Il n’y a que des histoires de cul derrière ces façades.

Ça doit être le manque de sommeil. La nuit avec Monsieur Rabatto qui pleurnichait, dégoulinant de morve. Le petit matin avec son épouse qui ment, j’en suis sûr. Mais que cache-t-elle ? Si elle pense qu’elle peut taire tous ses plans culs, voilà pour son compte. Maintenant elle sait que nous sommes au courant de tout !

Ma jenny est si loin de tout ça. Je veux devenir meilleur pour elle. Je veux lui prouver que je ne suis pas un sale type comme ceux qu’elle fréquente habituellement. Elle m’a dit qu’elle avait un penchant prononcé pour les voyous qui la faisaient souffrir. Pas au point de lui taper dessus comme Paul Fauré, on peut en parler maintenant que l’affaire est dans tous les journaux, mais ceux qui la mènent en bateau. C’est une sentimentale ma Jenny, une amoureuse. Quand je pense que pas un d’entre eux, même s’ils n’ont pas été très nombreux durant toutes ces années,n’a pris la peine de lui donner du plaisir. Alors que c’était si simple. C’était à portée de main. Elle était prête. Elle attendait que quelqu’un d’attentif la cueille. Et ce fut moi. J’en suis très fier. Chaque jour, après une nouvelle victoire sur son corps rétif, je me lève tel un homme nouveau. J’ai fait découvrir le plaisir à une femme qui se pensait condamner à une vie sans orgasmes. Elle m’en remercie souvent. Même après quelques mois elle en est encore toute étourdie chaque fois qu’elle y parvient. On dirait une enfant le matin de noël. Sa joie est si radieuse, si communicative que je m’empresse de la caresser et de la serrer dans mes bras. Elle n’aime pas refaire l’amour plusieurs fois, alors je ne la fais jouir qu’à la fin. Quand nous avons épuisé notre imagination,la mienne surtout. Mais je constate qu’avec le temps qui passe, maintenant que je commence à bien la connaitre, j’ai moins envie de lui faire n’importe quoi. Des heures dans la cabine de visionnage à regarder Paul Fauré baiser à couilles rabattues, loin de me stimuler, m’aurait plutôt donné envie d’un peu de sensualité et de complicité.

Quant à Madame Rabatto, après un moment d’abattement elle s’est ressaisie. Quand je rentre dans la petite sale éclairée par une ampoule crue et éblouissante derrière sa grille protectrice, elle m’attend, droite, agressive.

– ça m’est égal, ce que vous a dit Monsieur Teulé, attaque t’elle, c’est un menteur. Il a toujours voulu coucher avec moi et je l’ai toujours repoussé. Alors il se venge en faisait courir des ragots sur mon compte. Mais ça prend pas avec moi, je suis une femme mariée !

– qui couche avec son voisintout de même !

Elle se décompose. Elle avait oublié. C’est ça que j’aime dans les interrogatoires au petit matin. Après de longues heures d’attentes, peu ou pas de sommeil dans des conditions inconfortables, les gens perdent leur bon sens.

– pourtant je vous avoue que j’ai trouvé très peu crédibles les récits de Monsieur Teulé. Une femme si facile, ça semblait très improbable.

Je marque un temps d’arrêt et je la regarde reprendre confiance, puis j’ajoute :

– c’est pourquoi je suis allé interroger moi-même tous les hommes dont il nous avait donné le nom.

Elle s’affaisse complètement. On dirait une vieille pomme ratatinée. Les larmes coulent sur ses joues. Je ne sais pas pourquoi je la tourmente ainsi. Peut-être parce que, jusqu’à ce que son mari nous avoue son escapade en pleine après-midi, elle était la seule à ne pas avoir un alibi pour l’après-midi du meurtre. Mais en fait, je ne l’ai jamais vraiment soupçonnée. Je ne saurais dire pourquoi. Son inquiétude n’était pas feinte quand elle nous a reçus dans son intérieur fleuri. Pourtant je poursuis dans la même voie, on verra bien où cela nous mène :

– c’est amusant vous savez, chaque fois que j’en interrogeais un, il me donnait le nom d’un autre, comme si la tromperie devenait moins grave. Au total, j’en ai interrogé huit sans compter Monsieur Teulé bien entendu. Je me suis arrêté là parce que la liste devenait longue et qu’ils me racontaient tous la même chose. Vous savez ce qu’ils m’ont dit Madame Rabatto ?

Elle ne répond rien. Elle a baissé la tête et semble perdue dans ses tourments.

– ils nous ont tous parlé de vos appétits insatiables, de votre…facilité à fréquenter d’autres hommes que votre mari. Certains ont avoués n’avoir pas été tout seul avec vous, ce qui les a visiblement un peu vexés.

– et alors !Elle crie soudain, c’est pas un crime d’aimer faire l’amour. Je suis jeune, je plais aux hommes et j’aime le sexe. C’est pas grave. J’ai tué personne. Elle s’arrête, saisit par ce qu’elle vient de dire.

– c’est ce que nous essayons de déterminer, Madame  Rabatto…

– mais je vous dis que je l’ai pas tué, geint-elle. Je l’aimais. Les autres, ils comptaient pas. C’était pour passer le temps. Mon mari, il peut plus me faire l’amour . Au début j’ai pensé que ça allait passer. Je me suis fait refaire les seins en espérant que ça le stimulerait mais ça marchait pas. J’allais pas rester là à sécher comme une vieille plante ! Alors j’ai eu des amants. J’ai du tempérament moi, j’y peux rien ! Ça a toujours été comme ça. C’est pour ça que Robert il m’a épousé au début. Et puis, la vie…c’est compliqué. Et Paul, il me satisfaisait. Il était fait pour moi. Il était…bien constitué, vous voyez, c’est ce qu’il me fallait. Alors j’ai arrêté d’aller au club. Ils ont dû vous le dire ça aussi.

– oui, et c’est bien le problème…Parce que, si vous n’alliez plus au club, où étiez-vous le matin du meurtre ?

– Mais qu’est-ce que ça change, puisqu’il a été tué dans l’après-midi.

– ça, on n’en sait rien.

– mais si, je l’ai vu revenir dans l’après-midi !

– oui, mais vous dites l’avoir vu revenir à cinq heure et votre mari dit l’avoir trouvé mort à quatre heure. Nous avons un problème.

– je vous l’ai dit, je ne suis plus sure de l’heure. Je l’étais sur le moment mais j’ai dû m’embrouiller dans les programmes télé. Si mon mari dit qu’il l’a vu a quatre heures, c’est qu’il était rentré avant et que je me suis trompée.

– mais ça ne vous intrigue pas que votre mari se soit rendu chez Paul Fauré en pleine après-midi ?

-…si mais, je sais pas…il avait peut-être quelque chose d’important à lui dire…

– admettons, mais quoi ?

– je sais pas moi ! Demandez-le-lui !

– nous l’avons déjà fait . Mais ce qui m’intéresse c’est ce que vous vous en pensez.

– mais j’en sais rien…

– vous saviez qu’ils ne s’appréciaient pas beaucoup, tous les deux, n’est-ce pas ?

– oui, murmure-t-elle.

– alors, qu’est ce qui aurait pu pousser votre mari, qui savait que vous couchiez avec Paul Fauré, à se rendre chez lui en pleine après-midi, au risque de perdre son travail ?

– oh, ça, y-a pas de risque. Personne contrôle jamais ce qu’il fait !

– tiens donc, c’est intéressant à savoir.

– enfin, il a du travail mais tant qu’il est fait, c’est ça qui compte.

– donc, votre mari peut s’absenter quand il veut sans que personne ne le sache tant que son travail est fait ?

– oui, en quelque sorte.

– vous vous rendez compte que vous êtes en train de nous donner tous ce dont nous avons besoin pour l’inculper de meurtre ?

– mais pourquoi il l’aurait tué ? Chevrote-t-elle. Il y trouvait son compte lui aussi, ça lui convenait cette situation.

– vous croyez ? Il appréciait de savoir que sa femme couchait avec son voisin, cet homme bien plus séduisant que lui, dont la réputation de tombeur n’était plus à faire ?

– je sais pas ce qu’il appréciait. Il ne m’appréciait plus moi, ça c’est sûr. Sinon on n’en serait pas là. Si vous croyez que j’ai couché avec tous ces hommes pour lui faire du mal, vous vous trompez. J’avais besoin de sexe et mon mari n’était plus capable de m’en donner. Je l’ai trouvé là où il y en avait, à la salle de gym au début. Et puis il y a eu cette soirée barbecue. J’ai vu Paul Fauré et sa femme faire l’amour, comme ça, devant nous. Ils pensaient qu’on ne les voyait pas. Elle portait une petite robe courte. Elle s’est assise sur lui, vous voyez, sur ses genoux et elle bougeait lentement, comme si elle dansait au rythme de la musique et lui il continuait à parler. Je ne sais pas si quelqu’un d’autre les a vu, mon mari peut-être, il était encore plus près que moi et puis Paul s’est arrêté un instant, il a fermé les yeux. Quand il les a rouverts, ils étaient braqués sur moi et j’ai vu son sourire, un sourire auquel on peut pas résister et j’ai eu envie d’être à sa place à elle, pendant qu’elle fermait les yeux elle aussi et qu’elle continuait à danser. J’aurai voulu ressentir ce qu’elle ressentait à ce moment-là. Et puis elle s’est relevée et j’ai vu…l’engin de Paul. Vous savez, c’était un truc énorme. J’en avais jamais vu des comme ça à part dans les films pornos. J’en rêvais depuis toujours et il y en avait un juste sous mon nez, dans la maison d’à côté. Après qu’elle soit partie, on a sauté dans la piscine et on s’est frotté un peu, je voulais juste vérifier la taille, voir si je m’étais pas trompée et Paul a tout de suite réagit, il s’est collé à moi et j’ai su que c’était bon, que je l’avais trouvé. Il fallait que je fasse l’amour avec lui. Autant vous dire que j’ai pas trainé à aller sonner chez lui dès qu’elle a été partie au travail le lendemain. Il m’a ouvert et il a rien dit, il m’a tendu la main et il m’a déshabillée, simplement, puis il m’a…mis son chose, sa queue, là, et j’ai décollé, immédiatement. C’était la réponse à toutes mes attentes. La solution à mes problèmes. Plus besoin d’aller au sport, juste à me faufiler dans la maison d’à côté. J’ai regretté de ne pas l’avoir rencontré plus tôt. On était fait l’un pour l’autre. Il le disait lui aussi. Et puis il est mort et je n’ai plus aucune raison de vivre. Plus personne ne me comblera comme il l’a fait.

– et les films ?

– oh, ça, c’était pour nous, pour se regarder après, parce qu’on était beaux tous les deux.

– je parle de ceux que vous faisiez avant de rencontrer Monsieur Fauré. Ceux de la salle de sport…

– ceux-là, c’était pour Robert, répond-elle sans se démonter. Il me l’avait demandé. Il savait qu’il ne pouvait pas m’empêcher d’aller voir d’autres hommes puisqu’il ne pouvait plus me satisfaire mais il voulait en profiter aussi.

– mais que faisait-il avec ?je demande, interloqué.

– eh ben, ce que font les hommes quand ils sont tout seul !

– mais je croyais que votre mari était impuissant ?

– oui, enfin, non. Pas dans certaines conditions. Y-avait des trucs qui arrivait encore à le faire…bander.

– quoi par exemple ?

– mais demandez-le-lui !

– nous le ferons, mais j’aimerai avoir votre version.

– ben, il se mettait un truc autour du cou parfois et il serrait, et s’il avait un bon film porno, ça marchait. Il y arrivait plus que comme ça. J’ai essayé de l’étrangler au début, pour qu’on puisse refaire l’amour ensemble mais ça ne donnait rien. Je ne sais pas pourquoi il y arrivait plus avec une vraie personne. On a tout essayé, même les…enfin, vous savez quoi…les accessoires.

– non, expliquez-moi.

– ben, une fois,  il est revenu avec un grand…bidule qui vibre.

– un vibromasseur ?

– oui, voilà. J’ai pensé que c’était pour moi, mais non, il l’avait pris pour lui. Il m’a demandé de…c’est gênant, geint-elle, je dois vraiment continuer ?

– oui, c’est très important. Je réponds sans trop savoir où tout cela nous mène.

– bon, alors, il m’a demandé de le lui mettre et il a…aimé…

– vous pensez que votre mari avait des penchants homosexuels ?

– oh, non, pas du tout ! C’est pas ça ! C’était un jeu, c’est tout.

– vous avez recommencé après ?

– non, plus jamais, le truc a disparu et je ne l’ai pas revu.

Et puis, que s’est-il passé dans votre couple ?

– je vous l’ai dit, je lui ramené des cassettes et je ne sais pas ce qu’il en faisait. On ne faisait plus rien ensemble, si c’est ça votre question.

– à partir du moment où il a essayé le vibromasseur ?

– oui.

– merci Madame Rabatto, rentrez chez vous maintenant mais je vous demande de vous tenir à notre disposition si nécessaire.

– ça va durer encore longtemps ?

Sa voix n’est plus qu’un souffle. Elle est épuisée et anéantie, je le lis sur son visage pâle et diaphane comme sa chemise de nuit froissée qui s’entortille autour de ses jambes. En quelque semaine, cette femme est passé d’une bimbo provocante à une pauvre femme décharnée et sans vie.

– et Robert ? dit-elle en sortant de la pièce, escortée par un agent qui a ordre de la ramener à sa maison.

– nous le gardons encore un peu. Nous avons encore quelques questions à lui poser.

– je peux lui parler ?

– non, désolé, ce n’est pas possible.

Elle part, accablée et je vois le flic l’aider à monter dans la voiture, tant elle semble manquer de force. J’ai de la peine pour elle malgré tout. Sa vie n’est pas si drôle que ça finalement. Le sexe lui a servi de palliatif mais ne lui a pas apporté le bonheur. Enfin, peut-être que si Paul Fauré était toujours vivant, elle serait moins malheureuse ; peut-être dit-elle la vérité après tout ; peut-être allaient-ils réellement partir ensembles ? Comment le savoir maintenant ? Il est mort et son épouse a disparu. Personne ne nous donnera plus aucune information à ce sujet, à part son mari.

Je le laisse en peu poser et j’y retourne. D’abord je dois appeler Jenny, ma douce, qui doit se demander pourquoi je lui ai donné rendez-vous à la maison hier soir.

– Jenny ?

– hum, tu m’as réveillé…

– je suis désolé.

– ne t’en fais pas, c’est bon de t’entendre, tu vas bien ?

– oui, je voulais rentrer, mais tu sais l’affaire Fauré me prends beaucoup de temps.

– toujours pas de nouvelle de son épouse ?

– non ; tu dois bien être la seule à te faire encore du souci pour elle.

– pourquoi dis-tu ça, tu ne t’en fais pas toi ?

– non, plus depuis quelques temps. Nous n’avons absolument aucune piste nous permettant d’avancer. Elle a totalement disparue de la surface de la planète.

– c’est peut-être mieux comme ça…

– pourquoi tu dis ça ?

– je sais pas, je ne suis pas bien réveillée.

– non, dis-moi, ton avis m’intéresse.

– ben, de ce que tu m’as dit, elle ne semblait pas très heureuse…alors, je me dis que si elle a réussi à fuir cette vie, tant mieux pour elle. J’espère juste qu’elle n’est pas morte.

– tu penses ça toi ? Qu’elle a eu raison de fuir ?

– j’en sais rien, Samuel, tu me réveilles et tu me pose des questions sur une affaire dont tu refuses de parler avec moi.

– tu as raison, mais tu partirais toi ?

– non, moi j’ai de bonnes raisons de rester.

– ah, bon lesquelles ? Je lui demande, heureux d’entendre la réponse.

– ben, mon travail déjà. Je l’aime beaucoup et puis le travail c’est plutôt rare par ici…

– et ?

– et puis toi, bien sûr, qui m’a laissé dormir tranquillement toute la nuit…

– crois-moi quand je te dis que je le regrette.

– pas moi. J’ai aimé dormir dans tes draps parfumés. J’aime ton odeur Samuel. Je vais me rendormir maintenant. Je serai là cette après-midi si tu veux…

– oui, je pense rentrer dans l’après-midi et…

– je prends mon service à dix-huit heures.

– je me dépêche…

– amène du pain frais, j’ai envie d’un bon petit déjeuner.

– même si je rentre dans l’après-midi ?

– oui, j’ai l’intention de dormir jusqu’à ce que tu viennes me réveiller…

– oh, ma Jenny, tu es cruelle !

– non, attentive…

– je t’aime Jenny.

– moi aussi, dit la voix douce et endormie, je t’aime Samuel, à tout à l’heure.

Elle a raccroché et je reste longtemps le téléphone à la main et la queue durcie par le désir. J’aime cette femme, je peux le dire à ce stade. Je l’aime et je n’ai qu’une envie c’est d’être auprès d’elle, dans mon petit lit chaud qui ressemble au paradis depuis qu’elle y dort. Je rêvasse un moment immobile. Et si je rentrais tout de suite pour la retrouver ? Je cherche désespérément une raison valable de m’absenter qui me conduirait discrètement jusqu’à mon domicile, mais je dois manquer de pratique parce que rien ne vient. 

Je dois boucler l’interrogatoire de Rabatto rapidement parce que j’ai un amour qui m’attend dans mon lit. Si je continue à penser à elle je vais avoir la trique toute la journée et ça va être difficile d’échapper aux regards dans mon jean moulant et mon pull près du corps. Ah, la belle époque des pantalons baggy…

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