SUR LE FOND – Chapitre 9 – Du sable plein le coeur

Chapitre 9

Du sable plein le cœur

Thomas a eu une idée toute simple, il a dit :

– tu n’as qu’à t’appeler Virginie Ferrand. C’est un nom plutôt courant par ici et je serai flatté que tu portes mon nom.

Si on se mariait, tu le porterais de toute façon.

– oui mais on va pas se marier…

– et pourquoi pas ?

– parce que je suis déjà mariée !

– non, techniquement, tu es veuve  mais libre à toi de ne pas accorder d’importance à notre relation.

Il a dit ça sur le ton de la plaisanterie mais ses yeux graves ne riaient pas.

– écoute Thomas, ce que nous vivons actuellement…c’est un rêve. Un très beau rêve. Mais un matin, tu vas te réveiller et te demander ce que tu es en train de faire. Et crois-moi, à ce moment-là, tu seras heureux que nous ne soyons pas marié.

– pourquoi dis-tu ça ?

– parce que tu seras libre ! Tu pourras aller ou tu veux et aimer qui tu veux.

– non, je ne suis pas d’accord ! Un beau matin je vais me réveiller et comme tous les autres beaux matins, tu seras là ! Parce c’est ça que je veux.

– non je ne le pense pas.

– s’il te plait Virginie, donne-nous une chance.Laisse-moi la possibilité de te montrer que tu as tort, que je t’aime tellement que nous pouvons franchir tous les obstacles ensembles.

– tu es si jeune, thomas, si naïf !

– et toi tu es vieille et aigrie !

– tu vois, je te l’avais dit. On ne résiste pas très longtemps à l’usure du quotidien, crois-moi, je sais de quoi je parle.

– pourquoi, tu n’étais plus amoureuse de ton mari dès le lendemain de votre mariage ?

– précisément. C’est là que tout a commencé.

Je n’ai pas pu m’empêcher de le dire et je le regrette, je ne veux pas que Thomas connaisse les détails sordides de ma vie. Je veux le protéger de toute cette saleté, de toute cette violence qui a fait de ma vie un enfer. Cette dépendance sexuelle me fait peur elle aussi. J’ai été accro à Paul alors qu’il me traitait si mal. Que vais-je supporter de Thomas ?Ou pire encore, que vais-je lui faire subir ?

– je suis désolée, Virginie. J’ai parlé sans savoir. Je n’aborderai jamais plus ce sujet si tu veux.

– si, en fait, parlons en une bonne fois pour toute. Comme ça tu sauras d’où je viens.

Et je lui ai tout dit. Je ne lui ai rien épargné. De la première fois dans les toilettes, sans omettre la gifle, à ma nuit de noce sanglante, sans oublier toutes les humiliations, les tromperies, la violence, mais aussi le plaisir, ce putain de plaisir bestial que je ressentais chaque fois qu’il me possédait et Thomas a tout écouté, sans broncher, sans ciller, à part quelques petits foncements de nez par moment.

Quand j’ai eu terminé, j’étais épuisée et je me sentais sale, vraiment sale. J’avais l’impression, après avoir étalé ma vie sans mentir et sans tricher, d’avoir empuanti la pièce avec ces relents nauséabonds. J’en voyais toute la laideur pour la première fois, comme si j’avais enfin réussi à l’étaler pour en avoir une vue d’ensemble comme quand on déplie une carte routière et qu’on arrive enfin à se situer alors qu’avant on ne voyait que le point où l’on se trouvait. Tout était là, l’odeur entêtante du sexe, l’horreur des coups et du sang qui gicle et éclabousse le tableau. Parce que le sang fini par tout recouvrir. C’est ce qu’on ne voit pas quand on y est parce qu’on nettoie tout le temps. Mais le sang ne s’en va pas. Il reste au cœur de la vie et il la rend poisseuse et gluante. J’évoluais dans cet univers, priant en rentrant le soir pour ne pas trouver mon mari en train de baiser une Vanessa quelconque,priant pour qu’il l’ait baiséedans l’après-midiafin d’éviter les coups,priant pour qu’il me baise pour me sentir vivante. Et puis j’ai vu les larmes rouler sur ses joues et j’ai eu honte de lui avoir infligé ça.

– pardon, Thomas, pardon !Je n’aurai pas du te raconter tout ça. C’est si laid, si affreux. Je ne suis pas quelqu’un de bien, je te l’avais dit.

– je ne veux plus jamais t’entendre t’excuser pour ce que ce salopard t’as fait. S’il n’était pas mort, j’irai le tuer moi-même ! C’est tout ce qu’il méritait et je remercie celui qui a eu le courage de mettre un terme à tes souffrances. Il t’a permis de fuir et il m’a donné la chance de te rencontrer. Tu es une femme formidable Virginie, tu ne le vois pas ? J’aimerai tellement que tu te vois à travers mes yeux, tu comprendrais.

– mais je ne veux pas que tu pleures pour moi, je n’en vaux pas la peine.

– arrête de dire ça. D’abord,  je ne pleure pas, ce sont mes yeux qui s’expriment. Ensuite, j’aimerai que tu ressentes ce qu’il y a dans mon cœur comme ça tu saurais à quel point tu es quelqu’un d’admirable, tu es une survivante. Tu as réussi à échapper à l’enfer et il ne t’a pas rendu mauvaise. Depuis que je te connais, je ne vois que douceur et tendresse chez toi. Tu es gentille, tu es drôle, tu aimes la vie, tu ne t’en rends pas compte ?

Il crie presque et j’aimerai arriver à le croire mais je sens bien qu’il y a des éléments qu’il ne prend pas en compte. Peut-être ne lesa-t-il pas vu, peut être les a-t-il omit sciemment ? Mais il n’a pas un tableau complet de la situation, il ne voit que ce qu’il a envie de voir, j’en suis persuadée. Moi aussi d’ailleurs, j’occulte forcément quelque chose sinon je devrais déborder de joie et ce n’est pas le cas.

Nous finissons par trouver du réconfort dans les bras l’un de l’autre.Lovés sur le canapé, tous désirs sexuels éteints momentanément, nous regardons le vent secouer les maigres buissons qui se cramponnent à la terre rouge, qui résistent encore entre les pierres de la falaise. Le ciel est bas maintenant et la pluie ne saurait tarder. La mer se couvre au large de ouate grise qui s’épaissit au fil des minutes mais elle semble décidée à résister au vent et se cabre en vagues irrégulières dont la puissance dépend des aléas des rafales.

À la fin de l’après-midi, je me réveille et il fait pratiquement noir. Thomas a posé une couverture sur moi et je suis seule. La maison est silencieuse. Monsieur Alexandre est blotti à mes pieds. Il semble lui aussi redouter la tempête à venir. Des phares de voitures trouent l’obscuritéimposée par la noirceur du ciel. J’ai peur soudain puis je reconnais la frêle silhouette de Thomas qui se bat contre le vent. Son imperméable se gonfle sousles rafales et l’empêche d’avancer mais il lutte, un panier à la main.Il remonte l’allée comme s’il remontait un courant contraire. Quand il parvient à l’escalier, il est sauvé. En quelques enjambées il est à la porte qu’il franchit dans les hurlements coléreux des rafales qu’il repousse à l’extérieur. Elles encerclent la maison que la falaise protège pourtant, et leur souffle fou retenti sans cesse dans l’espace vide du salon. Thomas est glacé, ses joues froides sont trempés et ses yeux rougis.

– waouh, j’ai cru que je n’y arriverai pas ! Ils annoncentune énorme tempête. J’adore ça ! dit-il joyeux. Tu vas voir, c’est magnifique. Les éclairs, les roulements du tonnerre, et le vent qui ne s’arrête jamais. On se sent tout petit mais on se sent vivant et propre après, tu verras.

J’ai du mal à le croire. J’aimerai déjà ramper dans un trou et y disparaitre jusqu’à ce que le soleil revienne. Alors j’ai du mal à imaginer supporter pire et pourtant, avec tout ce que j’ai enduré, ça ne devrait pas m’affecter autant mais les éléments ne me laissent pas indifférentes. On ne peut pas lutter contre eux.Tout juste doit-onfaire preuve d’humilité et de reconnaissance qu’ils vous laissent en vie. Pendant que je sombre dans une dépression profonde, emmitouflée dans ma couverture, avec comme seul réconfort le corps tremblant du chien qui semble vouloir se fondre dans ma cuisse, thomas s’active dans la cuisine. On dirait qu’il a mis la main dans une prise électrique et qu’il en a aspiré l’énergie. Il bouge, il chante, il n’arrête pas et son activité frénétique m’irrite. Je voudrais du silence et du calme. Mais le ciel en a décidé autrement et Thomas semble en harmonie avec lui. Le bienheureux. Mon cœur cogne dans ma poitrine chaque fois que les rafales sifflent de plus en plus aigües, s’accrochant aux angles de la maison et la faisant trembler sur ses fondations.

– mais la maison, elle est solide ?

Il éclate de rire et sans cesser de s’activer il répond :

– ne t’inquiète pas, elle en a vu d’autre. Elle est conçue pour des séismes de bien plus grande envergure. C’est vrai que je ne te l’ai pas dit : Mon père est architecte. Il a construit cette maison pour résister aux tempêtes les plus violentes.

– mais alors pourquoi elle bouge ?

– c’est justement ça le truc, elle bouge mais ne tombe pas, comme la fable de la fontaine, le roseau et le chêne. Elle est montée sur des vérins qui lui permettent de supporter la violence du vent ou des tremblements de terre et de s’y adapter.

– alors elle va bouger comme ça durant toute la tempête ?

– oui, mais c’est mieux que de craindre que le toit s’envole ou qu’elle se casse la figure. Et tu vois, il a pensé à tout. Regarde, me dit-il me montrant les ouvertures qui donnent sur la falaise. La maison est exactement située dans une zone où la falaise ne peut pas s’effondrer.

– mais on ne peut pas le savoir ça !

– mais si justement, en faisaient des études géologiques. La falaise est solide mais ses bords sont écrêtés, comme tu peux le voir là, dit-il en me montrant la partie Est dont les crénelures correspondent aux rochers qui jonchent la plage. Mais pas au-dessus de nous. Là, elle est lisse et compacte. Donc, on ne risque rien.

– je préférai être dans un trou de souris que de voir la tempête se déchainer autour de nous !

– je comprends, mais dis-toi que tu te trouves dans un des endroits les plus sûr que tu trouveras. Ici, pas d’arbre pour écraser la maison, ils sont tous en contrebas. Une résistance aux vents hors du commun et trop en hauteur pour risquer d’être inondé.

– et un tsunami ?

– les tsunamis, c’est au japon et puis c’est lié à un tremblement de terre. Ici ce sont des ouragans. Mais ce soir, c’est juste une très grosse tempête. Mais elle ne va pas durer. Dans quelques heures, elle sera terminée.

– on peut pas s’en aller, plutôt ?

– mais pour aller où ? Je préfère rester ici et attendre tranquillement que ça passe plutôt que de prendre le risque de monter en voiture avec les trombes d’eau qui vont tomber.Ça c’est vraiment dangereux !Fais-moi confiance, on va être bien ici. Je vais te préparer un bon repas puis on mettra de la musique et on dansera. Ensuite on fera l’amour et tu t’endormiras comme un bébé.

– je ne crois pas, non !

– quoi, qu’on  fera l’amour ?

– non, ça d’accord, mais que je vais dormir comme un bébé, j’en doute !

– parce que tu ne me fais pas confiance. Viens danser avec moi pendant que la sauce mijote.

Il allume une petite chaine dissimulée dans un placard et l’espace se rempli des sonorités entrainante d’une musique sensuelle et gaie.

– qu’est-ce que c’est ?

– un truc que ma mère adore, de la Word music. Viens ! dit-il en me tendant la main.

J’hésite mais il est attirant avec ses cheveux bouclés et son sourire enjôleur. Je m’extirpe de la couverture au grand regret du chien qui gémit de mon départ et je rejoins Thomas dans l’espace de la cuisine où il m’attrape et m’entraine dans une danse collé-serrée langoureuse. Nous devons ressembler à deux clowns.Thomas accentue ses mouvements pour me faire rire et je finis par me détendre, puis il me lâche pour retourner à ses fourneaux. Perchée sur un tabouret, je le regarde plonger les pâtes fraiches dans l’eau frémissante tout en touillant une sauce à la tomate avec une spatule en bois.

– mais tu sais cuisiner alors ?

– oui, mais d’habitude j’ai la flemme et puis je manque de temps. Enfin, j’en manquais. Mais ce soir, il nous fallait du réconfort et tu n’étais visiblement pas en état de préparer le repas.

– c’est gentil. Je ne me souviens pas que quelqu’un n’aitjamais cuisiné pour moi. Ma mère faisait à manger pour tout le monde et Paul m’a mise dans la cuisine dès le premier jour.

Étrangement, je me sens libérée même si je sens encore le poids des souvenirs entre nous. Avoir pu lui parler de Paul et de ma vie avec lui m’a soulagée.

– tu sais, je croyais que je n’arriverai jamais à te dire tout ça. J’avais tellement honte. Je me sentais si sale.

– je comprends mais tu n’as plus besoin de t’en faire, il est mort et tu es loin. Tu as rompu définitivement avec ton ancienne vie et tu as tout à construire. Mais tu as du temps. On a tous le temps,ajoute-t-il en venant m’embrasser. Ses lèvres ont un gout de tomates et de viande rôtie et je les dévore avec délectation, mais il s’écarte en riant :

– eh ! C’est pas moi le repas, il arrive. Tiens prends les assiettes et mets la table s’il te plait. J’ai besoin d’aide.

Peu après nous nous attablons devant des tagliatelles à la bolognaise délicieuses et je retrouve avec un plaisir anticipé, le gout de son baiser. Il a rapporté de sa virée au village, une croustade aux pommes que nous mangeons dans un silence qui serait religieux si le vent ne rendait pas toute conversation pratiquement impossible. J’ai ce savoureux gout de pomme à l’armagnac dans la bouche et je veux le partager. Je me lève et embrasse Thomas qui répond à mon baiser avec passion. Ses yeux pétillent de joie. J’ai envie de le lécher partout et je m’y emploi au fur et à mesure qu’il ôte ses vêtements pour dégager son corps. Je glisse le long de son cou puis sur sa poitrine ou je m’attarde sur les tétons plats et sombres qui ressortent sur sa peau pâle puis je descends et me perds un moment dans les poils bouclés entre son nombril et son pubis. J’aime leur sensation sous ma langue. Paul était imberbe. Il se faisait épiler tout le corps en institut et mis à part une touffe de poil coupé court autour de son sexe, sa peau était glabre et lisse. J’aimais ça. J’avais l’impression de caresser un bodybuilder. Mais la peau peu bronzée et plus poilue de Thomas me convient bien mieux. Elle est naturelle et sans artifice. Pas de séances en cabine pour obtenir un hale permanent. Thomas doit bronzer l’été quand il se baigne et le sport ne semble pas être son activité favorite. Ça me va même je ne saurais dire pourquoi. Je me sens moins en infériorité physique. Je suis petite et menue certes, mais je suis tonique et musclée. Il le faut pour résister à une brute comme Paul. Enfin, il lefallait.

Quand enfin j’atteins son sexe si pale dans les poils bruns, il se redresse lentement et se déploie dans ma bouche. Je le goutte longuement, tournant autour du gland rose avec un soin méthodique. Je veux tout lécher ! La verge, les bourses. Je n’oublie rien. Je laisse ma bave amoureuse partout et bientôt, Thomas luit de ma salive. Les poils de ses testicules se sont noués en petits ronds sur la peau fine et rosie aux lacis de veines apparentes, et je m’amuse à les démêler. Remontant à l’extrémité de son sexe, je lèche un moment le frein rose, tendu à l’intérieur du gland, jouant avec lui comme une corde de harpe. Ma langue s’insinue sous le gland, remontant jusqu’au méat que je frotte délicatement puis je m’attache à son pourtour, léchant la couronne rougie sous la peau qui s’est dépliée. Thomas tient en équilibre instable sur le bord de sa chaise pour s’offrir à moi et ses soupirs de plaisir s’amplifient quand je le reprends enfin dans ma bouche, palpant de ma main libre ses couilles mouillées. Ses mains tâtonnent à la recherche d’une peau à caresser et je lui offre mes épaules pour soutien. Il s’en accommode. Accroupie devant lui je le suce tendrement, avec soin et précision, jusqu’à ce qu’il crie si fort que son orgasme couvre le bruit de la tempête qui fait rage à l’extérieur. Le sperme jaillit en jet puissant et je le bois sans réticence. Il lui faut un moment pour revenir vers moi. Ses yeux papillonnent encore et ses jambes ont du mal à le porter quand il m’entraine vers le canapé où il tombe, manquant écraser le chien. Il m’emporte dans sa chute et nous nous enlaçons jusqu’à ce qu’il reprenne ses esprits. Il est beau, nu dans ce canapé coloré où se superposent les couvertures multicolores. C’est un canapé profond et confortable, conçu pour le plaisir de ceux qui s’y installent. Son angle offre un coussin dont le soutien est une bénédiction pour la tête. Thomas me serre contre lui en murmurant « je t’aime » à mon oreille. Soudain une déflagration retentie, explosant dans la nuit, et une lumière aveuglante illumine l’intérieur de la maison. Puis les lumières et la musique s’éteignent dans un claquement éprouvant, nous laissent seuls, tous les deux, tous les trois, car le chien nous a rejoint, face à une mer déchainée par la tempête. On dirait un combat de titan et il est difficile de dire qui l’emporte de la tempête qui balance ses éclairs et ses roulements de tambours, ou de la mer qui lui oppose des vagues de plus en plus grosses dont l’écume ne cède pas sous les poussées redoublées du vent en furie.

– j’ai peur !

– non, regarde, c’est magnifique. La mer est folle.

– j’ai horreur de l’orage.

– il ne va pas durer. Regarde la pluie, on dirait un rideau !

En effet, l’averse s’est transformée en cataractes qui dégoulinent le long des vitres, rendant soudainement impossible tout vue extérieure. Seuls les éclairs nous permettent, le temps d’un instant, de voir que le monde est toujours là. Mais Thomas ne semble pas troublé. Il s’affaire à me déshabiller malgré le chien qui aimerait bien profiter de mon flanc réconfortant. Il le repousse régulièrement puis finit par céder à ses gémissements incessants.

– tant pis pour toi, tu vas nous regarder faire l’amour. Moi ça m’est égal, mais ne t’avise pas d’en vouloir un morceau, elle est à moi, dit-il à l’animal qui s’écrase comme une crêpe sur le canapé pour qu’on l’oublie. Habile, Thomas a réussi à dénuder mon corps, ouvrant mon gilet, relevant mon tee-shirt, faisant rouler mon pantalon de survêtement au coton souple et élastique. Ma culotte a glissé elle aussi et gitprès du chien qui refuse obstinément de bouger. Je sens son souffle chaud contre mon bras et je béni le canapé d’être si large. Thomas rampe entre mes jambes et seule sa tête bouclée reste visible pendant qu’il introduit sa langue dans mon sexe trempé. Elle s’attarde un peu sur le pourtour puis elle vient résolument se poser sur mon clitoris qu’elle ne lâche plus. Je commence à gémir et le chien en profite pour glisser sa truffe brulante sous mon aisselle. Son souffle chaud me chatouille et me gêne mais je n’ai pas le cœur de le repousser. Le plaisir s’intensifie. Il est si localisé que j’écarte les jambes pour lui permettre de se répandre dans mon corps. Mais la langue assidue de thomas, précise et rapide, le maintien au cœur de mon sexe qui s’embrase sous les caresses répétées. L’orgasme monte de façon régulière et je le sens prêt à exploser quand le chien commence à me lécher l’aisselle. Cette sensation si étrange et inattendue, m’emporte dans un rugissement de plaisir qui se diffuse, comme une vague tellurique, à tous mon corps. Thomas, surpris et heureux me laisse longuement profiter de ce bonheur que le chien entretien à ma plus grande honte, en me couvrant le flanc de sa bave chaude et odorante. Quand Thomas s’en aperçois, il lui met une claque sur la tête qui le fait sauter au bas du canapé.

– ca va pas non ? Je ne sais auquel de nous deux il s’adresse.

– laisse, c’était plutôt rigolo, je lui dis pour le rassurer.

– ça ne m’amuse pas. C’est avec moi que tu fais l’amour, pas avec le chien.

Un coup de tonnerre retenti et je ne saurais dire s’il souligne le propos de thomas où s’il exprime mon désaccord.

– je ne faisais pas l’amour avec le chien, imbécile, mais ce n’était pas désagréable.

– tu es une drôle de fille toi !

– pourquoi, parce que je prends mon plaisir là où il est ?

-…vu comme ça, ça se tient mais je préfère que tu le trouve avec moi. Couché ! Hurle-t-il au chien qui fait mine de remonter sur le canapé. Finalement Thomas lui concède l’extrémité d’un coussin, le menaçant d’un coup de pied s’il s’approche.

– regarde, je lui dis, il est terrorisé. Ça ne sert à rien de lui crier dessus, il a peur, c’est tout.

– je sais, et ça me serait égal s’il ne commençait pas à léchouiller ton corps. Tu pue le chien maintenant.

– il faudra faire avec parce que je n’irais pas prendre une douche dans le noir !

– c’est vrai ? Alors tant pis, j’éviterais de t’embrasser du côté droit et puis c’est tout. Pour le reste, je vais te faire l’amour jusqu’à ce que tu me demande pardon d’avoir laissé le chien te lécher un sein.

– mais il ne m’a pas lécher le sein, regarde, lui dis-je en lui montrant la trace encore humide laissé par sa langue, c’est là, sous mon bras. C’est tout !

– tu refuses de demander pardon, c’est ça ?

– oui je refuse !

– alors la nuit va être longue !

– tant pis, je supporterai…

J’ai à peine terminé ma phrase que Thomas me pénètre et les heures suivantes ne sont qu’une succession de fusion, de mélange et d’osmose où nos corps se percutent, se rencontrent, se frottent et s’extasient. Au petit matin, la tempête s’est éteinte et la lumière est revenue, pâle mais présente. Noscorps sont repus.Nous sombrons dans le sommeil après avoir accompagné le vent et le tonnerre de nos cris de plaisir. Aux petites heures de l’aube, pressée par un Thomas ensommeillé mais entêté, j’accepte de me présenter sous le nom de Virginie Ferrand, épouse de Thomas Ferrand.

En fait, je n’aurai que peu d’occasion de le faire puisque personne ne me demandera mon nom.

Dans les jours suivants,j’évite de sortir du périmètre de la maison et de la plage. Je ne suis plus tranquille depuis la rencontre fortuite avec les gendarmes et la découverte de mon portrait en pleine page de divers journaux.

Après quelques jours de mauvais temps, le soleil est revenu avec le mois de mai et comme le dit le dicton, nous avons fait ce qui nous plaisait et c’est bien.

J’ai l’impression d’être en vacances, de longues vacances. Nous mangeons, nous nous baignons, plus exactement, je me baigne pendant que Thomas sautille au bord de l’eau, nous faisons l’amour et nous dormons. Il part régulièrement faire des courses et depuis quelques jours, prend des airs mystérieux quand il rentre, sans m’en dire la raison. J’attends. Je ne crains rien de mauvais de sa part, alors je patiente. Je commence à le connaitre, il ne résistera pas éternellement à me mettre dans la confidence. Le mois de mai se déroule paisiblement.Nous regardons la nature renaitre après les rigueurs de l’hiver. Les buissons se couvrent de feuilles nouvelles, petites, d’un vert acide, elles donnent une impression de propre à la végétation malmenée par la tempête. Thomas m’a emmené visiter les corbières et nous nous sommes perdus avec délices dans des canyons de terre rouge où seuls les rochers s’accrochent encore. Nous avons remonté sur des centaines de mètres le cours d’anciens ruisseaux qui ont dû accueillir les fortes pluies du printemps. Quelques guets de pierres, au débouché de chemins de terre, attestent du passage des hommes dans cette région sauvage. La garrigue et sa végétation rase mais résistante est une découverte pour moi. Ces buissons rabougris, épars dans les pierres presque blanches, comme des os usés par le temps, rangées en lignes irrégulières, m’étonne. Le thym qui fleuri, se parant de rose clair, embaume l’air. Les buissons de romarin, vivaces et robustes atteignent des hauteurs qui feraient se pâmer les cuisinières en mal de bouquet garni. Sur un plateau qui domine la mer, nous avons cheminé, difficilement jusqu’à l’extrémité d’un champ de pierre d’où la plaine, puis les étangs et enfin la mer, se révèlent à nos yeux. Assise sur un inconfortable caillou biseauté, je contemple le paysage et rêve un moment d’y ériger une maison.

– ce serait un lieu idéal pour construire, en effet, mais ça n’est pas possible, me répond Thomas. Ces terrains appartiennent à l’Etat. Ce sont d’anciens terrains militaires, dit-il en ramassant, coincées entre les pierres, une douille d’obus si rouillée que je peine à comprendre ce que c’est, jusqu’à ce qu’il me l’explique avec force détail.

– Mon père s’y était intéressé lui aussi, mais il a dû renoncer ; ajoute-t-il.

Loin derrière nous, les vignes étalent leurs larges et récentes feuilles, si vertes sur le bois sombre des souches, que j’en suis émue. Des chardons au bleu éteint s’ouvre dans leurs gangues presque grises. Des petits buissons d’épineux rampent sur le sol et accrochent nos chaussures et nos pantalons. Ils se plantent cruellement dans nos semelles et déchirent les tissus qui s’y frottent malencontreusement. La nature est hostile mais regorge de vie. Des insectes en tout genre circulent, affairés.Nous croisons de nombreuses fourmilières dont l’activité incessante nous arrête un long moment. Des colonnes de fourmis se croisent, les unes partant vers des destinations connues d’elles seules, les autres, revenant, porteuses d’un morceau de feuille, d’une graine qu’elles peinent à maintenir en équilibre au-dessus de leurs têtes. Nous nous asseyons au bord d’un chemin de vigne, tracé par le passage des tracteurs, à même la terre jaune et fine comme du sable, sèche et poudreuse en ce début de printemps malgré les pluies diluviennes que la terre a absorbées comme un naufragé écluserait sa dernière goutte d’eau potable. Un cône d’une dizaine de centimètre de haut marque le sommet de la fourmilière dont les abords sont jonchés de petites herbes coupées et de graines rouges, attendant que les ouvrières viennent les chercher. L’une d’entre elles se bat pour faire entrer une fine paille jaune dans la cheminée encombrée. La brindille est trop longue mais la fourmi est têtue. Elle s’obstine malgré le va-et-vient incessant de ses congénères, ralentissant leur passage ou le détournant par moment, mais aucune d’elles ne semble lui en tenir rigueur. Elles se contentent de serpenter autour de l’importune, comme si sa présence était un aléa de plus dans leur vie mécanique. À notre départ, presque hypnotisés par le mouvement incessant de ces insectes besogneux, elle se bat toujours. Je ne connaîtrais pas l’issue de ce combat. Peut-être se laissera-t-elle finalement emportée par le flot incessant de fourmis qui repartent en quête de nouveaux trésors. Peut-être mourra-t-elle d’épuisement sous l’effort, coute que coute, pour faire entrer cette foutue brindille dans cette foutue cheminée. Elle seule le sait, et encore, en a-t-elle seulementconscience ?

Ma vie d’avant ressemblait à cela. Mon corps combattait chaque jour pour que tout soit à sa place et ma tête, elle, refusait de réfléchir, refusait de voir l’épouvantable chaos dans lequel je me trouvais. J’étais un robot programmé pour effectuer des gestes répétitifs. Quelques moments de répits m’étaient parfois offerts et je les saisissais comme on s’accroche à une bouée. L’attention de Paul était ma raison de vivre. Son amour, les preuves physiques qu’il m’en apportait, me maintenaient en état de fonctionner. Avec Thomas, je suis devenue la reine des fourmis, la reine de la garrigue. Je sautille entre les pierres, légère et heureuse, prenant garde aux ronces et aux chardons, aux « arrête-bœuf ». Mais sa main est là, son épaule me soutien quand je flanche et il me relève chaque fois que je vacille. Il m’aime. Et je l’aime, je peux le dire maintenant parce que le temps a passé. La vie est faite de recommencement. Je l’aime et je le lui dis. Il en est si heureux qu’il en oublie de travailler pour me combler d’amour. Je le laisse faire, gorgée de sève nouvelle, d’énergie joyeuse et de désirs épanouis. Nous nous aimons, dans son lit, sur le canapé, dans la cuisine, sur la machine à laver qui s’agite au rythme de nos copulations hilares, nos fesses tressautant dans les vibrations conjugués de l’essorage du tambour et des orgasmes qu’il déclenche.

Le mois de Juin passe et thomas accepte d’entrer dans l’eau jusqu’à la taille. Moi je barbotte, heureuse comme un poisson. La mer est surprenante. Sa limpidité me séduit toujours autant. Parfois elle m’accueille avec des vagues en rouleaux si réguliers et puissants que je ne peux que sauter pour les éviter, avalant de l’écume blanche et salée par gorgées entières pour me retrouver échouée sur la plagemalgré mes efforts, toussant pour dégager mes poumons à moitié remplis d’eau. D’autre fois elle m’entraine au large, trompeuse sous ses abords lisses et calmes. Et certains jours merveilleux elle m’attend, majestueuse et sereine, chaude et douce et je m’y plonge avec ravissement, n’en ressortant que quand mes mains perdent toute sensibilité. Je pourrais vivre ainsi éternellement mais la réalité rattrape toujours le rêve, car c’est un rêve que nous vivons, je ne cesse de le dire depuis le début, et il explose comme une énorme bulle de savon le jour où nous trouvons Valérie, la sœur de Thomas, affairée à ranger ses vêtements dans l’armoire de sa chambre. De huit ans son ainée, elle vient préparer la maison pour l’arrivée de ses enfants – trois petits monstres, au dire de Thomas – et de son mari qui la rejoindra début Août. Ses parents sont attendus au début du mois de juillet. Thomas s’affole, courtdans tous les sens et fini par retrouver un semblant de bon sens.

– Valérie, je te présente Virginie, ma…petite amie, dit-il mal à l’aise.

Le regard inquisiteur, Valérie me passe en revue et hausse légèrement les sourcils. Puis elle retourne à ses occupations après un bonjour cordial qui ressemble pourtant à une fin de non-recevoir. Il la suit à l’étage et je l’entends parlementer :

– tu sais, Virginie habite avec moi en ce moment.

– j’espère que tu as bien travaillé ?

– ben, disons que j’ai pas mal avancé mais j’ai encore beaucoup de boulot.

– bien. Qu’est-ce que tu attends pour t’y remettre ?Ne t’inquiète pas pour moi, j’ai beaucoup de choses à faire et je n’ai pas besoin de t’avoir dans mes pattes.

– oui mais, ce que je voulais te dire, c’est que Virginie vit ici.

– tu veux dire dans cette maison ?

– oui…

– ah, et bien il va falloir qu’elle rentre chez elle alors. Papa et maman ne seront pas d’accord pour héberger ta petite copine. Tu sais à quel point ils sont vieux jeu !

– non, il ne me semblait pas…je trouve que c’est toi qui réagit bizarrement.

– ah bon ? Pourquoi dis-tu ça ? Parce que je te dis qu’une fille que tu ne dois pas connaitre depuis plus de quelques jours ne peut pas vivre ici ?

– dis comme ça, c’est facile.

– mais c’est facile en effet ! Enfin, Thomas, les amourettes de cette nature ne sont pas faites pour durer, tu le sais. Combien d’amoureuses as-tu eu au fil des étés que tu as passé ici  et combien ont résisté à la séparation ? Allez, soit raisonnable, dis à cette jeune femme de rentrer chez elle et peut-être, si tu as de la chance, votre relation passera l’été. Mais tu te doutes bien qu’elle ne peut pas vivre ici avec toute la famille.

– tu fais bien venir ton mari et tes enfants toi !

– ce n’est pas pareil, Thomas, nous sommes marié et papa et maman adore leurs petits-enfants.

– on se demande bien pourquoi, mais ça n’est pas le problème !Ce n’est pas à  toi de me dire ce que je dois faire ou ne pas faire. Et si nous étions mariés Virginie et moi, hein, tu dirais quoi?

– que tu n’es pas assez fou pour te marier à ton âge et que cette fille, ou cette femme, n’est pas faites pour toi, je te le garanti.

– tu parles sans savoir, tu ne la connais même pas !

– détrompe-toi, il m’a suffi d’un regard pour me convaincre que ce n’était pas la bonne.

– je te défends de parler d’elle comme ça !

– mon Thomas, tu es amoureux ? Pour de vrai ? Ton petit cœur d’artichaut s’est arrêté sur cette petite créature fragile ?

– tu n’es qu’une connasse ! Tu as toujours été une connasse et tu le seras toujours ! Je te déteste, toi, ton mari et tes sales mômes puant et braillards.

– c’est ça, fait ton caprice et retourne dans ta chambre faire tes devoirs, mon lapin.

– Sale pute !

Une porte claque et Thomas redescend, la mine fermée.

– elle me fait chier, putain, je la hais ! C’est qu’une salle pétasseconnasse, sa mère, sa race maudite !

– je vais partir Thomas. C’est mieux. Je vais faire mes bagages et je vais m’en aller.

– non, pas question de céder !

– si, c’est mieux comme ça. Je ne pourrais pas supporter son regard condescendant. J’en ai trop vu des filles comme elle, pour qui je ne suis rien. Je ne veux plus revivre ça. On a vécu des choses merveilleuses mais c’est fini maintenant.

Je le vois réfléchir à toute vitesse. Je pourrais presque lire ses pensées affolées derrières ses yeux qui s’agitent en tous sens. Il cherche désespérément une solution et il n’en a pas.

– écoute Thomas. Ce n’est pas grave. On se retrouvera peut-être plus tard…la vie c’est comme ça, il faut l’accepter.

– non, je ne suis pas d’accord. Je ne la laisserais pas foutre en l’air tout ce bonheur. Elle n’en a pas le droit.

– non mais elle a raison,oùallons-nous ? Que fais-tu de tes études ? Tu as tout laissé tomber pour t’occuper de moi et je t’en remercie, mais tu as une vie à mener. Rappelle-toi, je te l’avais dit. Ça devait finir un jour. Les choses aussi parfaites ne peuvent pas durer, elles ne sont pas faites pour durer.

– je refuse que ça se termine comme ça ! Tu vas me laisser quelques jours. J’ai besoin de quelques jours.J’ai un plan ; fais-moi confiance, je t’en supplieVirginie ; tu vas rester ici jusqu’à ce que j’ai trouvé une solution et je t’assure que je vais en trouver une. Quant à ma sœur, j’en fais mon affaire.

Il remonte l’escalier quatre à quatre et j’entends une porte s’ouvrir et claquer à nouveau. Des voix dont je ne distingue plus les propos s’échauffent un moment puis le silence revient. Thomas reparait, souriant.

– bon, une bonne chose de faite. Tu vas rester ici, avec la bénédiction de ma sœur qui ressemble à une grosse salope mais qui n’en ai pas une, et tu vas me laisser le temps de me retourner. Et il m’enlace avec tant de fougue que je cède à ses baisers amoureux.

– alors ça non ! dit une voix retentissante. Valérie descend l’escalier mais son regard pétille.

– alors comme ça, vous avez réussi à ensorceler mon petit frère…excusez mes propos déplacés, je veille sur lui depuis sa naissance et j’ai tendance à être un peu trop protectrice.

– ne vous excusez pas. Je crois que j’aurai réagi de la même manière si j’avais un petit frère comme Thomas.

Elle s’arrête un moment, réfléchit, puis son regard revient sur moi et elle dit :

– je pense qu’on va bien s’entendre finalement toutes le deux. On peut se tutoyer ?

– si tu veux…

– bon, écoute Virginie, je n’ai rien contre ta présence, même si il semble que Thomas n’ait pas beaucoup travaillé ces deux derniers mois, mais, comme tu l’as entendu, nous allons être bientôt très nombreux et je ne pense pas que tu puisses rester. Nos parents sont plutôt cool mais Thomas, c’est le petit dernier, tu sais, le chouchou. Il le voit encore comme un gros bébé. J’ai entendu ce qu’il m’a dit sur ses sentiments pour toi et je le crois, mais mes parents ne sont pas prêts pour ça. Ils l’imaginent avec une jeune fille de son âge, étudiante, plutôt riche…

– je sais, je l’interromps, c’est aussi ce que je lui ai dit.

– j’aime mon frère autant que mes enfants, tu vois, et je dois prendre soin de lui. Pour le moment, tu peux rester ici. Prenez le temps de trouver une solution ensemble, ce sera mieux pour lui.

– eh ! Arrête de parler de moi comme si je n’étais pas là ! Je veux que Virginie reste !

– Thomas, je vais rester quelques jours, et puis je partirai, c’est mieux comme ça.

– non, je ne suis pas d’accord ! Et moi alors ?Et mes sentiments à moi ?Tout le monde s’en fout. Toi tu décrète qu’elle doit partir, et toi, dit-il en me montrant de la main, tu lui obéis sans résistance !

– non, ce n’est pas vrai mais je m’étais préparé à cette séparation depuis longtemps. J’ai toujours su qu’elle arriverait. C’est toi qui a refusé de l’entendre quand je t’en parlais.

Thomas a pleuré longuement et je l’ai réconforté. Ce jour-là, nous avons fait une longue ballade sur la plage et nous n’avons plus parlé. Nous nous sommes serrés l’un contre l’autre, agrippés. La nuit venue, après un repas avalé dans un silence inhabituel, nous sommes montés dans sa chambre et nous avons fait l’amour avec tout notre désespoir, et il était si profond que nous n’avons pu nous rassasier l’un de l’autre. Thomas a jouit dans des cris déchirants pendant que j’étouffais mes orgasmes dans les profondeurs moelleuses des oreillers que je mordais de toutes mes forces. Nos corps étaient irrités et réactifs et ils ont demandés réparation toute la nuit. Nous nous sommes abreuvés l’un de l’autre autant que nous le pouvions mais la soif était si forte que rien n’a pu l’étancher. Je me suis endormie, Thomas couché sur moi, son sexe encore en moi, épuisée et malheureuse. Au réveil, nous avons recommencé. J’avais l’impression que ma peau était électrique et que le moindre contact réveillait la souffrance enmême temps qu’il amenait le plaisir. Les longs mouvements de Thomas ont fait exploser un orgasme si puissant que j’ai oublié  un instant la séparation imminente, mais je n’ai pu empêcher les larmes de rouler sur mes joues. Thomas les a léchées comme il a léché mon sexe gonflé. La douleur s’est mêlée au désir et je l’ai laissé me faire mal, jusqu’à ce que le plaisir violent supplante la fulgurante douleur qui irradiait mon clitoris. Je me suis abreuvée à son sexe qui m’a inondé. Je l’ai lapé à petite gorgée, essayant de me repaitre de lui, de m’en remplir pour ne pas l’oublier. Je savais que je devais partir, que c’était la dernière fois, une des dernière fois et parce que Thomas le savaitlui aussi, il m’a retenue au bout de sa queue jusqu’à ce qu’il flanche, finalement, vaincu par la fatigue, incapable de bander une nouvelle fois, incapable de jouir…nous étions allé au bout de nos corps, au bout de nos forces et c’était la fin, c’était inéluctable.

Il m’a regardé remplir mon sac des quelques affaires que j’avais accumulé durant ces semaines passées à ses côtés et il m’a accompagné jusqu’à sa voiture. Il a tenu la portière pour que je monte et il m’a conduit, loin dans les collines, le long d’une route pierreuse qui serpentait sur une crête. Au bout, une bergerie en pierre, presque enfoncée dans le sol, surmontée d’un toit aux vieilles tuiles roses disparates. Des volets de bois sombres fermaient des fenêtres étroites munies de barreaux en fer travaillés comme des sculptures. Des amis à lui vivaient là en communauté. Ils étaient cinq, trois garçons, deux filles. La troisième ayant déserté durant l’hiver. Ils élevaient des chèvres et faisaient poussez de l’herbe dont ils faisaient commerce. Cette source de revenus leur permettait de vivoter dans un semblant d’autarcie grâce à un potager qu’ils entretenaient fiévreusement, guettant l’arrivée des légumes avec fébrilité. Pour la plupart végétariens, plus par nécessité que par choix philosophique, ils étaient maigres, échevelés et peu porté sur l’hygiène.

Voilà ou Thomas me déposa en cette fin du mois de juin après des promesses de revenir vite, régulièrement, de ne pas m’abandonner, de ne pas m’oublier, jamais. Nous avons pleuré longuement dans les bras l’un de l’autre appuyés contre la voiture, espérant que nous corps s’accrochent à jamais. Nous nous sommes fait des promesses folles que nous voulions croire de tout notre cœur. Il reviendrait dans quelques jours avec, il l’espérait, une autre solution que cet hébergement qui ne devait être que temporaire et je l’ai cru parce que je n’avais plus que cela pour me raccrocher à notre amour qui s’interrompait brutalement alors qu’il n’avait pas atteint sa pleine maturité. Puis je l’ai regardé partir, cahotant sur la route. La petite voiture bordeauxa disparu derrière des buissons et je me suis retournée. Au loin, par-delà la ligne sombre des collines, la mer apparaissait encore, fine bande bleue, porteuse de tous mes espoirs.

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