UN BAISER OU LA MORT Chapitre 12

Je me décidais à descendre prendre mon petit déjeuner vers midi et je fus surprise de trouver ma mère debout et habillée car je ne l’avais pas entendue. Elle avait préparé un repas léger mais délicieux que je savourais en silence.

Finalement ce fut elle qui parla la première :

– j’ai l’impression que tu as passé une bonne soirée…

Ce n’était pas une question alors je ne répondis rien et hochais la tête tout en enfournant le délicieux gâteau au chocolat qu’elle avait cuisiné.

– pour les leçons de conduite…j’aurais préféré que Marina m’en parle mais je trouve que c’est un excellent cadeau. Bien sûr je la dédommagerai. Je ne peux pas laisser des inconnus te payer ton permis de conduire.

– ce ne sont pas des inconnus ! M’écriais-je, ce sont nos voisins et ce sont aussi des amis !

– amis…dit ma mère comme si elle réfléchissait à la définition du mot.

– j’ai pourtant eu l’impression que tu t’entendais bien avec Hans et Marina…

– ils sont gentils en effet mais tu es bien placé pour savoir qu’il ne faut pas se fier aux apparences, n’est-ce pas Colette…ajouta ma mère en me jetant un regard ou je lus un fugace instant de haine.

– Maman, je croyais qu’on avait décidé de laisser le passé derrière nous. Ce n’est pas pour ça qu’on est parti si loin ?

– tu as raison…excuse-moi Colette, parfois tout ça me fait…bouillir…

– je sais maman et je t’ai déjà dit que j’étais désolée mais j’aimerai tant qu’on oublie tout ça…

– j’essaie, j’essaie vraiment mais parfois…tu vois Marina, elle se mêle de ce qui ne la regarde pas. Pourquoi pense-t-elle qu’elle a le droit de payer ton permis de conduire ? C’est à moi de faire ça ! C’est à moi de prendre cette décision !

Je restais silencieuse un moment. Le dragon était réveillé et je devais me débrouiller pour le gérer sans trop de dégâts sinon ma vie allait redevenir un enfer.

– écoute, dis-je finalement, si tu veux, je me ferais rembourser l’argent des leçons de conduite et je le rendrais à Marina. Elle comprendra.

– Qu’est-ce qu’elle comprendra ? Que je ne suis pas d’accord pour qu’elle paye pour toi ? Que ce n’est pas à elle de t’offrir ça, ni de décider de ça ? Que tu n’es pas à vendre ?

Elle criait maintenant et son corps tendu vibrait de rage. Il y a quelques mois, j’aurais fondu en larmes, supplié, demandé pardon jusqu’à ce que nous soyons tellement épuisée toutes les deux que nous finissions par nous arrêter à bout de force mais aujourd’hui, aujourd’hui particulièrement je n’étais plus d’accord pour que nous recommencions à jouer cette comédie. Alors je me levais en silence, débarrassais mon assiette et la laissais seule dans la cuisine. Quand je montais les escaliers, je m’entendis crier « Colette » avec force mais je ne me retournais pas.

J’en avais fini avec tout ça et c’était grâce à Jacob. Dès que je me fus allongée dans mon lit, je lui envoyais un texto :

COLETTE : Matinée compliquée avec ma mère, on peut se voir ?

JACOB : Tu es libre maintenant ?

COLETTE : Je prends ma douche et je te retrouve au coin de  la rue

Je ne voulais pas que ma mère me voit devant la maison des Anderson. Elle était bien trop en colère et je savais le genre de décisions absurdes qu’elle pouvait prendre quand elle était dans cet état-là. Dès que j’eus fini de m’habiller, je descendis les escaliers espérant que ma mère ne serait pas dans les parages. Mais elle était toujours assise à la table de la cuisine et j’eus presque de la peine pour elle. Quand elle me vit son regard devint dur et elle lança ?

– où vas-tu ?

Je faillis renoncer puis me souvenant que je n’avais rien à me reprocher, je répondis tout aussi durement :

– je vais prendre l’air, on étouffe ici !

– et tes devoirs ?

– il me reste une semaine de vacances…criais-je et je claquais la porte et partis en courant jusqu’à l’angle de notre rue où Jacob m’attendait au volant de sa voiture, moteur allumé. À peine avais-je grimpé à bord qu’il démarra. J’attachais ma ceinture en hâte et je dis :

– salut…

– …lut…répondit-il concentré sur sa conduite rapide et nerveuse.

Je ne dis plus rien. Il y avait assez de tension comme ça dans ma vie. Je ne voulais pas savoir pourquoi Jacob ne parlait pas. Je voulais juste m’éloigner de ma mère et l’oublier au moins pour un moment.

Je regardais la route qui défilait au son de « XXXtentacion ». Les virages s’enchainaient et Jacob poussait le moteur à fond dans les lignes droites. Finalement au bout d’un moment il s’engagea sur une petite route en terre battue et s’arrêta au bout d’une esplanade. De ce plateau oublié des promoteurs, on dominait toute la ville. La vue était à couper le souffle. La mer était d’un bleu turquoise profond et les trois caps étaient visibles car les brumes d’été avaient disparues pour laisser la place à un air limpide et frais. C’était l’endroit idéal pour s’aérer la tête et se calmer les nerfs. Décidément Jacob savait ce dont j’avais besoin. Il sauta de la voiture et dit d’un ton péremptoire :

– viens !

Je défis ma ceinture et descendis du véhicule, curieuse de voir où il m’emmenait. Un sentier partait en contre bas de l’aire et il l’emprunta à grand pas. Au bout d’une trentaine de mètres, il débouchait sur une sorte de terrasse naturelle sur laquelle un banc en bois était fixé.

– d’ici nous aurons les idées plus claires pour parler, dit-il.

Je regrettais de ne pas avoir pris mes lunettes de soleil. En ce début d’après-midi le soleil était déjà rasant. Il faisait scintiller la mer comme un miroir et les petits bateaux à voile qui constellaient les différentes baies ressemblaient à des petits triangles blancs perdus dans cette immensité lumineuse.

Jacob qui m’avait laissé admirer la vue, passa soudain ses bras autour de ma taille et m’enlaça avec force. Il posa ses lèvres sur ma bouche et murmura avant de m’embrasser avec passion :

– j’ai rêvé de faire ça depuis que tu es partie.

Je retrouvais le gout de ses baisers de la nuit et le plaisir de m’abandonner à son étreinte. Nous restâmes longtemps serrés l’un contre l’autre, profitants de la chaleur de nos corps et du plaisir d’être ensemble. Finalement, je me tournais vers la mer et je dis en tendant mon visage vers le soleil pour profiter de sa chaleur :

– c’est magnifique ici.

– j’ai trouvé cet endroit sur « GoogleMaps », dit-il très sérieusement alors que je m’asseyais sur le banc. Je cherchais un endroit pour être tranquille et pour voir la mer et je l’ai aperçu. Je me suis baladé en « streetview » mais on ne peut pas aller plus loin que la route. Après je suis venu en voiture et j’ai découvert qu’on pouvait descendre jusqu’ici.

– merci « google », dis-je en plaisantant. Le silence régna un moment puis Jacob dit en se posant sur le banc à mes côté :

– Qu’est-ce qui s’est passé avec ta mère ? C’est à cause de cette nuit ?

– non, elle ne sait rien…heureusement…c’est à cause des cours de conduite…

– elle ne veut pas que tu apprennes à conduire ?

– non elle ne veut pas que ce soit ta mère qui…le décide. Je vais devoir lui rembourser les leçons de conduite sinon ma mère ne me laissera pas tranquille.

– mais c’est stupide, s’exclama-t-il. Ma mère m’a demandé ce qui te ferait plaisir et…c’était mon idée parce que je sais que tu te fiches d’avoir le dernier Iphone ou une enceinte surpuissante…je me suis dit que serait sympa que tu puisses conduire avec moi quand tu aurais finis tes leçons…

– C’était un super cadeau, Jacob, ne te reproche rien…c’est ma mère…depuis…enfin, elle n’est plus pareille avec moi. Elle m’en veut pour ce qui s’est passé avec mon père. Elle ne s’en rend pas toujours compte mais je pense qu’elle me reproche d’être en partie responsable de ce qu’il a fait…

– c’est absurde ! s’écria Jacob mais devant mon air fermé il abandonna le sujet.

Nous restâmes encore un long moment silencieux puis je glissais ma main dans la sienne et je dis :

– comment allons-nous faire maintenant…

– qu’est-ce que tu veux dire ? Tu parles de ta mère ?

– oui mais aussi de la tienne, de tes parents et du lycée…

– écoute, tant que tu ne changeras pas d’avis et que tu ne voudras pas qu’on nous voit ensemble, on continuera comme on l’avait décidé. On se verra chaque fois qu’on pourra et pour les autres…on est amis, non ? J’ai bien le droit de t’emmener au lycée dans ma voiture.

Et soudain je réalisais que je n’allais plus avoir à prendre le bus avec Alicia ! Mais en même temps je me rendis compte que ma mère ne serait jamais d’accord. Quand j’en fis part à Jacob, il dit :

– Elle n’a pas besoin de le savoir. Je peux te prendre au coin de la rue comme tout à l’heure.

– ce serait vraiment génial mais Alicia voudra aussi monter dans ta voiture.

– oui, et bien c’est moi qui conduit alors c’est moi qui décide et si je ne veux pas qu’elle monte, elle prendra le bus. Après tout je ne lui dois rien…alors que toi…je te dois la plus belle nuit de ma vie, ajouta-t-il en me tirant jusqu’à lui jusqu’à ce que je m’asseye à califourchon sur ses cuisses. Puis il recommença à m’embrasser avec tant de passion que je sentis mon cœur fondre. Le reste de l’après-midi fut tendre et passionnée.

Au moment où la nuit tombait, Jacob me raccompagna chez moi et dit :

– tu viens ce soir ?

– je verrais dans quelle humeur est ma mère, je ne suis pas sure de pouvoir sortir en douce tous les soirs.

– si tu ne viens pas, c’est moi qui viendrais, dit-il en riant.

– elle ne te laissera jamais rentrer !

– on verra…

 

 
   

 

 

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